Goodbye Colombus de Larry Peerce (1969)
Neuf ans après la toute première adaptation de Philip Roth (Expect the Vandals devenu Battle of Blood Island sous la direction de Joel Rapp), c’est au tour de Larry Peerce, le réalisateur du Procès de Julie Richards (prix d’interprétation à Cannes pour Barbara Barrie en 1964) de s’attaquer à cette nouvelle publiée par l’écrivain américain en 1959, qui lui avait valu sa première reconnaissance hors des frontières américaines. Peerce adapte la nouvelle avec l’aide au scénario d’Arnold Schulman qui avait notamment coécrit La Ruée vers l’Ouest (Anthony Mann) et Un trou dans la tête (Frank Capra). Le cinéaste confie les rôles principaux à deux débutants sur grand écran : Richard Benjamin (qu’on retrouvera plus tard dans Mondwest de Michael Crichton et Harry dans tous ses états de Woody Allen) et Ali MacGraw qui deviendra dès l’année suivante une star planétaire grâce à Love Story. Choisie après que Barbara Parkins (La Vallée des poupées) et Natalie Wood (qui lui a préféré le Bob et Carol et Ted et Alice de Paul Mazursky) ont refusé le rôle, la comédienne voit sa prestation primée par un Golden Globe de la révélation de l’année. Le film décrochera une nomination aux Oscars, celle de la meilleure adaptation, où il s’inclinera devant Waldo Salt pour Macadam Cowboy.
La Couleur du mensonge de Robert Benton (2003)
Robert Benton adapte La Tache, l’avant-dernier roman du cycle Nathan Zuckerman, entamé par Philip Roth en 1981 avec L’Écrivain des ombres. Publié en 2000, son action se situe pendant la procédure d’impeachment de Bill Clinton, lors du scandale Monica Lewinsky, et a été inspirée à son auteur par la chasse aux sorcières dont a été victime l’un de ses amis, professeur à Princeton, après l’emploi du mot « spook » (mot à double sens qui est aussi une insulte raciste pour désigner les Noirs) à l’attention de deux étudiants afro-américains absentéistes. Le récit joue sur le fait que Silk, accusé de racisme, a des origines afro-américaines qu’il a cachées pour échapper aux règlements ségrégationnistes. Nicholas Meyer (à l’origine de Liaison fatale d’Adrian Lyne) adapte ce roman pour le réalisateur de Kramer contre Kramer qui retrouve ici son héroïne de Billy Bathgate, Nicole Kidman, aux côtés d’Anthony Hopkins et Gary Sinise. Wentworth Miller, le futur héros de la série Prison Break, y faisait ses débuts sur grand écran en incarnant Coleman Silk, le personnage campé par Hopkins, dans ses jeunes années.
American Pastoral d’Ewan McGregor (2016)
Sixième volume du cycle Nathan Zuckerman, sacré prix Pulitzer de la fiction en 1998, Pastorale américaine avait déjà été adapté au cinéma huit ans plus tôt dans un court métrage signé Alex George Pickering. Ewan McGregor a choisi de s’en emparer pour sa toute première réalisation, alors que ce projet d’adaptation écrit par John Romano (Intolérable Cruauté des frères Coen) circulait depuis 2006 à Hollywood avec Philip Noyce (Calme blanc) derrière la caméra et le trio Paul Bettany/Jennifer Connelly/Evan Rachel Wood dans les rôles principaux. Choisi dans un premier temps pour remplacer Paul Bettany, Ewan McGregor a proposé de réaliser le film, une fois Noyce parti du projet, Jennifer Connelly restant dans la partie et Dakota Fanning remplaçant Evan Rachel Wood. Présenté au festival de Toronto, le film fut accueilli avec fraîcheur par la critique américaine qui lui a reproché une trop grande sagesse et un manque d’ampleur en regard de la fresque historique tonitruante de Roth. Ewan McGregor n’a pas réitéré son expérience de réalisateur depuis.
The Plot Against America, créée par Ed Burns et David Simon (2020)
Uchronie se déroulant dans les années 40 aux États-Unis, Le Complot contre l’Amérique, inspiré à Philip Roth par la lecture des pages consacrées à Lindbergh dans l’autobiographie de l’historien Arthur Meier Schlesinger Jr., a été publié en 2004. Roth entendait ainsi tout à la fois montrer le risque d’une possible dérive fasciste des institutions américaines avec une allusion à peine voilée à l’administration Bush, et rendre hommage à ses parents en tentant d’imaginer leur réaction si un président antisémite était parvenu au pouvoir en 1940. Seize ans plus tard, Ed Burns et David Simon, le duo déjà à l’œuvre sur The Wire, portent le roman à l’écran dans une minisérie de 6 épisodes de 55 minutes chacun, en égratignant l’Amérique d’un autre président, en place au moment de la diffusion du show sur HBO, Donald Trump. Accueillie par une critique emballée, la série réunit à l’écran Winona Ryder, Zoe Kazan ou encore John Turturro.
Tromperie d’Arnaud Desplechin (2021)
Publié en 1990, Tromperie marquait une date majeure dans l’œuvre de Philip Roth : il prêtait pour la première fois son nom à l’un de ses personnages. Cette part autofictionnelle avait dès sa sortie séduit Arnaud Desplechin (lui-même coutumier du genre) qui avait offert le livre à l’une de ses collaboratrices pendant la préparation de Comment je me suis disputé…, avant de jouer avec Emmanuelle Devos sa scène finale pour un bonus DVD de Rois et Reine. C’est après avoir vu ce bonus que Roth a appelé le cinéaste pour l’encourager à adapter son livre. Le cinéaste a longtemps pensé ce geste voué à l’échec et mettra plus de quinze ans pour y parvenir, après avoir un temps pensé l’adapter sur scène, avec Denis Podalydès dans le rôle central. Il a utilisé le confinement pour aller au bout de cette idée, avec l’aide de Julie Peyr (qui l’avait déjà accompagné sur Jimmy P., Trois Souvenirs de ma jeunesse et Les Fantômes d’Ismaël) afin de réorganiser le récit d’origine. Denis Podalydès est toujours en tête d’affiche face à une distribution féminine composée notamment de Léa Seydoux, Rebecca Marder, Emmanuelle Devos et Anouk Grinberg. Tromperie a été présenté en première mondiale hors compétition lors du dernier Festival de Cannes.
Soutiens du CNC : Aide au développement d'œuvres cinématographiques de longue durée, Avance sur recettes après réalisation, Aide sélective à la distribution (aide au programme), Aide à l'édition vidéo (aide au programme éditorial)
Cannes 2021
Tromperie a été présenté en séance spéciale sous le label « Cannes Première » au Festival de Cannes 2021. Arnaud Desplechin est un réalisateur on ne peut plus habitué à la Croisette puisque la plupart de ses films y ont été sélectionnés.