Phase IV (Saul Bass, 1974)
Génial créateur de génériques de films (notamment pour Alfred Hitchcock, Otto Preminger ou Martin Scorsese) et d’affiches minimalistes saisissantes (Shining, Sueurs froides…), le graphiste américain Saul Bass n’a réalisé qu’un seul et unique long métrage. Phase IV raconte comment des fourmis très intelligentes assiègent des scientifiques coincés dans un bunker au cœur de l’Arizona, en préambule à leur conquête de la Terre. Une fable SF écologique et apocalyptique, quelque part entre 2001, l’Odyssée de l’espace et Les Oiseaux. Le tout rythmé par des gros plans franchement terrifiants de fourmis, et un scénario pensé pour nourrir de multiples interprétations sur l’origine de la mutation des insectes.
L’Inévitable Catastrophe (Irwin Allen, 1978)
Une base de missiles au Texas est victime d’une étrange épidémie, qui se répand via des piqûres d’abeilles tueuses. Un essaim meurtrier fait des ravages dans l’État, alors que des scientifiques tentent de trouver un vaccin… Pur produit de son époque, L’Inévitable Catastrophe (The Swarm, en VO) d’Irwin Allen est une série Z au budget haut de gamme, avec un toujours impeccable Michael Caine dans le rôle principal. Un film catastrophe qui mise sur les effets réels, au point d’avoir utilisé des milliers de véritables abeilles, dont les dards avaient tout de même été coupés pour éviter les accidents. Mais les insectes, conservés dans une caravane réfrigérée afin de les endormir, ont malheureusement diffusé du venin dans l’air à leur réveil. À la clé, quelques allergies. Pas grand-chose par rapport à ce que certains personnages subissent dans le film.
Phenomena (Dario Argento, 1985)
Après avoir enchaîné Suspiria (1977), Inferno (1980) et Ténèbres (1982), Dario Argento se renouvelle encore une fois avec Phenomena, film d’épouvante dans lequel l’insecte n’est pas une menace pour l’héroïne, mais un mécanisme de défense. L’histoire rocambolesque d’une jeune vedette de cinéma confrontée à un tueur en série. Mais Jennifer Corvino (Jennifer Connelly) a un atout pour survivre : elle est capable d’entrer en communication avec les insectes. Le film vaut surtout pour son idée originale, et quelques séquences cauchemardesques avec les bestioles.
La Mouche (David Cronenberg, 1987)
Un scientifique brillant, Seth Brundle (Jeff Goldblum), invente une machine pour se téléporter et décide de la tester sur lui-même… sans se rendre compte qu’une mouche s’est glissée dans la cabine de téléportation. Cette adaptation de la nouvelle de George Langelaan – déjà portée à l’écran par Kurt Neumann en 1958 (La Mouche noire) – encapsule toutes les obsessions de David Cronenberg pour la mutation des corps et la difformité. « C’est une histoire de mort, une histoire de mort très grave, sur la mort physique, sur la mort comme événement physique », résume le cinéaste dans son livre d’entretiens avec Serge Grünberg (*). Une vision terrifiante de la maladie qui foudroie un couple, analysée sous l’angle du film d’horreur. Au fil de sa transformation, Brundle sera témoin de sa propre déchéance et de tout ce qui fait de lui un être humain, avec moult effets gore. Plus que la figure de l’insecte géant, c’est ici l’autodestruction d’un corps que Cronenberg utilise pour générer dégoût et frayeur.
Microcosmos : Le Peuple de l’herbe (Claude Nuridsany et Marie Pérennou, 1996)
Comment filmer au plus près l’infiniment petit tout en gardant des intentions de grand cinéma ? Microcosmos : Le Peuple de l’herbe, gros succès en salles avec plus de trois millions d’entrées, a nécessité deux ans de préparation et près de trois ans de tournage. Le défi, homérique, consistait à réaliser un documentaire sur les insectes et les animaux de l’herbe et de l’eau, mais à leur hauteur. Un film sur un monde quasiment microscopique, qui a nécessité la création d’outils sur mesure, notamment un robot permettant de guider à distance les mouvements de la caméra (avec une précision d’un dixième de millimètre). Riche en travellings et en panoramiques impensables à l’époque, le film de Claude Nuridsany et Marie Pérennou alterne les prises de vues à l’extérieur et dans un studio construit au milieu d’un champ de l’Aveyron (les trois quarts du film). La musique de Bruno Coulais se mélange à des sons réels, captés sur place, et d’autres créés artificiellement. Le montage et le mixage ont ainsi pris neuf mois. Toujours considéré comme la matrice du genre au cinéma, Microcosmos : Le Peuple de l’herbe a d’abord été présenté hors compétition au Festival de Cannes, avant de remporter cinq César en 1997, dont ceux de la meilleure photographie et du meilleur son.
Starship Troopers (Paul Verhoeven, 1998)
Incompris à sa sortie, Starship Troopers de Paul Verhoeven a longtemps été considéré comme une série B sans substance, au lieu de la satire antimilitariste mordante que visait le réalisateur. « C’était un film sur la politique américaine », assurait, en 2018, le cinéaste. « En tant qu’Européen, il me semblait que certains aspects de la société américaine pouvaient devenir fascistes : le refus de limiter le nombre d’armes sur le territoire ; le nombre d’exécutions au Texas quand George W. Bush était gouverneur… » Starship Troopers mettait face à face de jeunes recrues naïves d’une fédération du XXIVe siècle et des insectes géants. Entre deux scènes d’action aussi spectaculaires qu’absurdes se dessinait une fiction politique parodiant la propagande nazie, et mettant en garde contre le totalitarisme.
Mimic (Guillermo del Toro 1997)
Troisième film du Mexicain Guillermo del Toro, Mimic est également sa première incursion en terres hollywoodiennes. Tournage compliqué, script malmené, montage supervisé par le producteur Harvey Weinstein… Le réalisateur garde du film un souvenir pour le moins ambivalent (« Mimic était un vrai désastre. Il y a du bon dedans, mais ce qui est mauvais est vraiment catastrophique », disait-il il y a quelques années). Le sujet du film ? Deux médecins manipulent génétiquement des insectes pour juguler une épidémie transmise à l’homme par les cafards. Mais une espère mutante naît de leurs expériences. Bientôt, ces insectes atteignent la taille humaine et développent un système de camouflage qui les rend plus dangereux encore que la maladie. Proprement terrifiant par instants, Mimic reste marqué par sa production chaotique. Mais del Toro a sauvé son âme en remontant une version director’s cut sortie en DVD, plus proche de sa vision d’origine.
Bug (William Friedkin, 2006)
Trois ans après son polar Traqué, William Friedkin revient au cinéma d’horreur qui a fait sa légende. Bug met en scène Ashley Judd et Michael Shannon dans un motel désert et sinistre, où ils découvrent que de mystérieux insectes s’introduisent sous leur peau… Délire total ? Secret d’État ? Paranoïa ? Folie partagée ? Un huis clos entre Grand-Guignol et terreur pure, adapté de la pièce de théâtre du dramaturge américain Tracy Letts, et tourné en seulement vingt-et-un jours.
Minuscule : La Vallée des fourmis perdues (Thomas Szabo et Hélène Giraud, 2014)
Avant d’être un film, Minuscule a débuté sur le petit écran. Une série d’animation composée d’épisodes courts, entièrement muets. Un principe repris au cinéma par les réalisateurs Thomas Szabo et Hélène Giraud, qui ont utilisé un étonnant mélange d’images de synthèse (les insectes) et de décors réels (dans les parcs nationaux du Mercantour et des Écrins). Ce film tout public au format Cinémascope raconte la bataille entre deux bandes rivales de fourmis et l’amitié profonde entre une coccinelle et une fourmi noire. Avec ses scènes d’action épiques et son humour à la Buster Keaton, Minuscule : La Vallée des fourmis perdues a rassemblé plus de 1,2 million de spectateurs dans les salles, et remporté le César du meilleur film d’animation en 2015. Une suite, Minuscule 2 - Les Mandibules du bout du monde, a vu le jour quatre ans plus tard.
La Nuée a été soutenu par le CNC à travers l’appel à projets films de genre. Sortie le 4 novembre.
(*) David Cronenberg, entretiens avec Serge Grünberg (Éditions Cahiers du Cinéma)