Catherine Blondin est une mère de famille dévouée, cheffe de chœur à ses heures perdues, dans une chorale inclusive nommée Extra. Mais elle va chambouler son existence sans histoire en devenant assistante sexuelle pour personnes en situation de handicap. Une double vie s’ouvre alors à elle… À travers Catherine, Matthieu Bernard et Jonathan Hazan soulèvent la question de l’accompagnement sexuel « encore considérée comme un tabou » et introduisent le spectateur à ces problématiques peu connues. « C’est une thématique autour de laquelle il y a encore beaucoup de préjugés », insistent les scénaristes et réalisateurs, qui ont ainsi choisi de ne pas partir du point de vue d’un bénéficiaire ou d’un accompagnant formé, mais d’une mère au foyer ordinaire. « Son personnage sert de porte d’entrée à cet univers. Elle s’aventure dans un domaine qu’on ne connaît pas, qu’elle ne connaît pas. À travers elle, ses moments galvanisants, ses doutes, ses joies et ses peines, se posent toutes ces questions autour de l’accompagnement sexuel pour en comprendre les enjeux dans un pays où ce sujet n’est pas encore encadré légalement. » Les deux créateurs ont beaucoup enquêté, interrogé. « Nous avons réalisé que ce qui pose un problème – avant de savoir si nous sommes pour ou contre – est le fait qu’il n’y ait pas de cadre en France. C’est comme une forme de déni, poursuit le producteur Alexandre Charlet. Parce qu’il y a encore de nombreux tabous sur le handicap et la sexualité. On préfère ne pas voir. Notre héroïne, un peu béotienne sur les bords, va totalement improviser parce qu’elle ne peut pas se former légalement. »
Répondant à un appel d’OCS Signature qui cherchait une comédie de 26 minutes sur le thème handicap et comédie, Extra. explore une question de société, tout en intégrant autant que possible des acteurs, actrices, techniciens et techniciennes en situation de handicap au sein de la production. « Mais avant tout, ce qui était important était d’avoir des acteurs et des actrices qui incarnent au mieux nos personnages, qu’ils soient valides ou non valides, explique Matthieu Bernard. Nous en avons parlé avec OCS et nous étions tous d’accord sur le sujet. Nous en avons aussi discuté avec des associations touchant au handicap et pour elles également, l’essentiel était d’avoir de bons comédiens capables d’incarner des sujets qui les concernent. Par ailleurs, nous avons aussi choisi des acteurs en situation de handicap qui ont joué un autre handicap que le leur dans la série ! Cela montre qu’être comédien, c’est être comédien avant tout. Ils ne sont pas définis par leur handicap. »
Jonathan Hazan précise que « la réflexion sur l’inclusivité nous a guidés dès l’écriture », avant de souligner que cette volonté s’est aussi heurtée au « modèle économique fragile » d’une série OCS. « Extra. est une production filmée en décors naturels, pas en studio. Ce qui veut dire que 90 % de nos décors, qu’ils soient publics ou privés, n’étaient pas adaptés aux personnes en situation de handicap. C’est une réalité qui soulève des questions logistiques lorsque nous devons tourner huit à neuf minutes utiles par jour. Ce rythme très physique pose une limite au niveau du casting des rôles principaux. Mais dès que nous avons pu, sur des rôles secondaires comme les membres de la chorale qui se jouent dans un seul décor fixe, nous sommes allés chercher des acteurs et actrices réellement en situation de handicap. Parfois, nous nous sommes même adaptés à leur handicap, comme ce choriste sourd qui chante en signant dans la série. Ce n’était pas prévu dans le script au départ, mais en tournant, nous avons décidé de l’intégrer à l’histoire parce que nous trouvions que cette scène enrichissait la série. Il ne faut pas être dogmatique dans l’approche d’une série comme Extra. »
La série a bénéficié des aides sélectives à la préparation et à la production du Fonds de soutien audiovisuel (FSA) du CNC, ainsi que de l’appel à projets « Les Uns et les Autres », porté par le Centre en partenariat avec l’Agefiph, dont l’objectif est d’œuvrer en faveur de l'insertion professionnelle des personnes handicapées dans les entreprises du cinéma, de l’audiovisuel, des industries techniques, de l’animation et du jeu vidéo. « Nous avons été accompagnés au maximum du montant de l'appel à projets. Ce qui a aidé à rendre accessible le tournage à certains acteurs en situation de handicap, souligne Alexandre Charlet. Nous avons également travaillé avec une structure, elle aussi aidée par "Les Uns et les Autres" pour recruter des comédiens en situation de handicap, ce qui était une priorité pour nous. Ils sont en effet encore peu nombreux à être formés, ou professionnels, ou disponibles, à même de rentrer dans le cadre serré de nos contraintes budgétaires et techniques », précise le producteur avant d’ajouter que ses équipes se sont par ailleurs confrontées à un autre enjeu, celui de l’accessibilité aux salles de cinéma en particulier indépendantes, pour la projection finale de la série. « Nous nous sommes rendu compte que peu de salles de cinéma indépendantes avaient un accès PMR ! Nous avions mis un point d’honneur à ce que tous ceux qui ont participé à la série puissent assister à l’avant-première, peu importe leur handicap. Or, le manque d’accessibilité aux fauteuils roulants a très largement restreint le choix de la salle. Mais il y a une volonté pour que ça bouge. Peut-être qu’une série comme Extra. peut aider. L’appel à projets “Les Uns et les Autres” permet également de remettre ces thématiques sur le devant de la scène ».
Faire avancer les mentalités et ouvrir le champ des possibles, c’est l’autre mission de la série OCS. Pour Jonathan Hazan et Matthieu Bernard, « ce genre de débat ne fonctionne qu’avec un maximum d’ouverture d’esprit. Et il faut pouvoir se demander à la fois : est-ce qu’on peut intégrer au casting un comédien valide pour un rôle de personnage handicapé et est-ce qu’on peut inclure le plus d’acteurs possible en situation de handicap ? » Sur le fond, Extra. aimerait aussi faire bouger le débat sur l’accompagnement sexuel des personnes en situation de handicap. « Nous parlons là d’un besoin très humain, mais pas seulement. Il y a la question de l’isolement, de personnes qui ne savent pas avec qui partager des questions sur leurs corps… Les accompagnants peuvent aussi avoir ce rôle-là : être dans l’écoute et l’échange, au-delà du rapport charnel. Pour cela, nous avons travaillé avec une sexologue et fait relire les textes par une psychologue clinicienne, qui a pu apporter une forme de justesse et briser les tabous. » Pour autant, les deux créateurs souhaitent que leur série reste un divertissement, une comédie capable d’aborder avec légèreté le sujet du handicap dans le cadre de la fiction, autour d’enjeux émotionnels. Parce qu’Extra. « n’est pas non plus un fascicule autour de l’accompagnement sexuel. Nous ne voulons être les porte-paroles d’un sujet qui ne nous touche pas directement. »
Extra. saison 1 – 10 épisodes de 26 mn – Sur OCS
Créée, écrite et réalisée par Jonathan Hazan et Matthieu Bernard
Produite par Alexandre Charlet (Les Films du Cygne)
Avec Anne Girouard, Stéphane Debac, Nicolas Lumbreras…
Musique de Pierre-Antoine Durand
Soutiens du CNC : Fonds de soutien audiovisuel (Aide à la Préparation – sélectif, Aide à la Production - sélectif)
La série a également bénéficié de l’appel à projets « Les Uns et les Autres » en faveur de l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap dans les filières du cinéma, de l’audiovisuel, des industries techniques, de l’animation et du jeu vidéo.