Isadora Duncan sur grand et petit écran

Isadora Duncan sur grand et petit écran

20 novembre 2019
Cinéma
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Les enfants d'Isadora
Les enfants d'Isadora de Damien Manivel Shellac Distribution
À l’occasion de la sortie en salles des Enfants d’Isadora, retour sur les films et téléfilms qui ont mis à l’honneur cette danseuse d’exception, disparue en 1927 à l’âge de 50 ans.

Isadora Duncan, the Biggest Dancer in the World de Ken Russell (1966)

Née à San Francisco en mai 1877, l’Américaine Isadora Duncan a révolutionné la pratique de son art par son parti pris de privilégier la spontanéité et le naturel, qui formeront les bases de la danse contemporaine. Célébrée de son vivant, la danseuse, disparue en 1927 à Nice, a inspiré de nombreux artistes, dans tous les domaines. Sylvia Plath y fait référence dans son poème Fever 103°. Pete Doherty lui a rendu hommage dans sa chanson Salome. Lemony Snicket a nommé deux des personnages des Désastreuses Aventures des orphelins Baudelaire Isadora et Duncan en son honneur… Et le cinéma et la télévision ne furent évidemment pas en reste. Ken Russell fut le premier à s’emparer de cette légende mythique. Le futur réalisateur de Tommy s’est pour cela inspiré d’Isadora, an Intimate Portrait, publié en 1928, fruit des conversations entre la danseuse et l’auteur Sewell Stokes avec lequel elle s’était liée d’amitié à la fin de sa vie. Son téléfilm mêle images d’archives et fiction et c’est Vivian Pickles (Harold et Maude) qui interprète le rôle-titre. Le cinéaste a toujours considéré ce film comme l’une de ses œuvres préférées.

Isadora de Karel Reisz (1969)

Trois ans après le petit, Isadora Duncan a les honneurs du grand écran grâce à Karel Reisz qui s’inspire lui aussi des écrits de Sewell Stokes. Le film marque un changement de registre pour ce réalisateur, figure de proue du mouvement Free Cinema avec ses compatriotes Tony Richardson, John Schlesinger et Lindsay Anderson. Après plusieurs films marqués par de fortes préoccupations sociales, le voici aux commandes d’un biopic flamboyant construit sur des allers-retours temporels entre la danseuse vieillissante et affaiblie installée sur la Côte d’Azur et les différents événements qui ont marqué sa vie. L’interprétation éblouissante de Vanessa Redgrave reçoit toutes les louanges. Six mois ont été nécessaires à l’actrice, révélée deux ans plus tôt dans Blow-Up, pour apprendre à danser comme Isadora Duncan et rendre son personnage crédible à l’écran autant lors de sa jeunesse triomphante que dans les heures funestes de son déclin. Nommée à l’Oscar, où elle s’incline face au duo Katharine Hepburn (Un Lion en hiver)/Barbra Streisand (Funny Girl), elle remporte le prix d’interprétation du festival de Cannes dont le jury était présidé cette année-là par Luchino Visconti.

La Danseuse de Stéphanie Di Giusto (2016)

Si Isadora Duncan n’est pas le personnage central de ce premier long métrage de Stéphanie Di Giusto, elle en constitue pourtant un élément essentiel. Car la réalisatrice a décidé de consacrer ce film à sa grande rivale, Loïe Fuller, fille de ferme du Grand Ouest américain qui va devenir l’une des gloires des cabarets parisiens de la Belle Époque avant de danser à l’Opéra. Jusqu’à ce que sa rencontre avec Duncan, jeune prodige avide de gloire, ne précipite la chute de cette icône du début du xxe siècle. Comme l’explique la réalisatrice : « Isadora incarne tout ce que Loïe ne peut pas être : la jeunesse, le génie et la grâce. C’est elle la danseuse. Il lui suffit d’apparaître quand Loïe doit s’entraîner durant des heures et user de mille artifices. » Ce que la cinéaste considère comme une injustice perdure encore aujourd’hui : si leurs deux tombes sont situées à 100 mètres l’une de l’autre au Père-Lachaise, celle de Fuller est enfouie sous la végétation alors que celle de Duncan est toujours entretenue avec soin. Les César, eux, n’ont pas fait de jalouses : les comédiennes qui les incarnent – Soko (Loïe Fuller) et Lily-Rose Depp (Isadora Duncan) – ont toutes deux été nommées.

Les Enfants d’Isadora de Damien Manivel (2019)

Damien Manivel fut danseur contemporain avant de devenir cinéaste (il a remporté le Prix Jean Vigo du court métrage 2010 avec La Dame au chien), mais jusque-là, il n’avait jamais consacré de film à sa passion première. Il a donc franchi le pas en consacrant son quatrième long métrage à Isadora Duncan dont il admire « la démesure, l’exigence artistique folle et cette injonction constante à être toujours plus libre ». Et il a conçu ce film-hommage comme un ballet en trois temps. On y suit d’abord une danseuse (Agathe Bonitzer) dans un studio, accompagnée en voix off par des extraits d’une biographie de Duncan. Puis un chorégraphe qui prépare un spectacle autour de Duncan avec une danseuse souffrant du syndrome de Down. Enfin une femme rentrant chez elle totalement bouleversée par la découverte de ce spectacle. Comme son titre l’indique, l’originalité des Enfants d’Isidora tient dans sa manière de jouer avec l’idée de transmission, une des obsessions des dernières années de la vie de Duncan. Le film a eu les honneurs de la compétition internationale du festival de Locarno 2019.

Les Enfants d’Isadora, en salles le 20 novembre, a bénéficié de l’aide au programme éditorial vidéo, l’avance sur recettes après réalisation et l’aide sélective à la distribution (aide au programme).