L’UGC Ciné Cité des Halles est le seul cinéma de France à proposer des séances à partir de 9h. Celles du mercredi sont devenues au fil du temps un véritable baromètre pour évaluer très tôt les attentes des spectateurs. Des Parisiens, mais pas seulement : un film qui démarre fort aux Halles a de grandes chances de bien fonctionner par la suite dans l’Hexagone. Patrice Le Marchand est le directeur de ce cinéma situé au cœur de la capitale. Il nous explique comment ces séances sont devenues incontournables pour les distributeurs.
Des séances stratégiques
« La semaine cinématographique commence le mercredi et se termine le mardi. Donc la première séance de France, c'est celle des Halles, car nous sommes les seuls à proposer des films à partir de 9h. Les autres salles démarrent en général à 10h ou 11h. C'est une séance historique, unique, qui existe depuis 1996. Cela nous permet d’avoir deux premières séances avant 14h : il y en a une autre avant midi, qui obtient en général environ le même score que celle de 9h. Grâce à ces horaires, on a souvent une séance de plus en 24h aux Halles.
Autre point important, nous comptons 27 salles, qui vont de 45 à 500 places, ce qui offre la possibilité de sortir quasiment toutes les nouveautés. La politique d'UGC est rarement de confier plusieurs écrans aux mêmes films. On aime la diversité et avoir la programmation la plus diversifiée possible. On laisse de la place pour les projets indépendants, les documentaires…»
Une première tendance
« L'idée en observant les scores de cette première séance, c'est d'avoir une idée des succès et échecs à venir. Les carrières des films peuvent se jouer là. Les distributeurs s'attendent à un certain démarrage, mais parfois leur film va enregistrer un score bien en-dessous, et passera alors dans de plus petites salles, alors que d'autres fois, ils vont avoir une bonne surprise et obtiendront une plus grande capacité de spectateurs dans la foulée. Dans notre multiplexe, un long métrage peut ainsi changer de salle dès le jeudi matin. En revanche, on ne déprogramme pas de film avant la fin de la première semaine, jamais. Même si ses premières séances sont catastrophiques, il sera à l'affiche au moins une semaine. Notez aussi qu'à résultat à peu près égal, on favorisera plutôt le cinéma français et le cinéma d'auteur.
Tout ne se joue toutefois pas uniquement sur la première séance. Impossible de se dire : 'Tiens, ce film a fait 35 entrées à 9h aux Halles, donc il passera les 400 000 entrées en France’, c'est un peu plus compliqué que ça. Une fois qu’on a les chiffres de la journée du mercredi en global, on a déjà une idée claire de ce qui marchera ou pas. Il faut aussi prendre en compte le marché : Les Halles, c'est un cinéma du centre de Paris, donc un film qui a pour cible un autre public, moins urbain, ne fera peut-être pas de score mirobolant à la séance de 9h, mais pourra atteindre plusieurs millions d'entrées en France au final ».
Des chiffres clés pour les distributeurs
« Au début des premières séances de 9h, les distributeurs nous téléphonaient pour connaître ces premiers résultats. Maintenant, ils se déplacent, on organise un petit déjeuner sur place en parallèle des projections, et les chiffres circulent sur les réseaux sociaux. L’équipe d’un film peut aussi venir le présenter au public : dans ce cas, on le précise sur les réseaux sociaux, on est transparents, car une séance animée par un réalisateur ou des acteurs attire potentiellement plus de monde. Sur Facebook, la page Debriefilm partage justement chaque semaine une vidéo dédiée aux avis à chaud du public de ces séances de 9h ».