L’histoire d’amour entre le Picasso et le 7ème art est belle et riche. Aujourd’hui, la Cinémathèque française expose comment Federico Fellini a été inspiré par le peintre. Il est loin d’être le seul réalisateur à l’avoir approché. D’abord ses compagnons d’armes du surréalisme. En 1937, Picasso tourne à Antibes sous la direction de son camarade Man Ray, un « essai cinématographique », La Garoupe, avec Emily Davis, Cécile Eluard, Paul Eluard, Nusch Eluard, Roland Penrose et Valentine Penrose. Ancêtre des films de vacances, le film ne raconte rien si ce n’est la complicité et le bonheur d’un groupe d’amis. Mais cela montre aussi que le peintre, né 14 ans avant l’invention du cinématographe, est très à l’aise avec le medium. Il s’inspirera de l’art du mouvement dans sa peinture.
Le Festival de Cannes en voisin
Dès 1948, Pablo Picasso s’installe à Vallauris, sur la Côte d’Azur. Et c’est en voisin qu’il vient à la rencontre de ses amis cinéastes sur la Croisette. En 1953, il crée même la controverse juste en montant les marches. Très ami avec le cinéaste Henri-Georges Clouzot, il désire le soutenir lors de la projection au Palais des Festivals du Salaire de la Peur. Problème : l'artiste annonce qu’il ne revêtira pas la tenue de rigueur. Après moult tractations, il accepte de remettre un nœud papillon et échange la veste de smoking contre une veste en peau de mouton.
Un objet de convoitise
Pendant plusieurs années, les deux amis échangent sur un projet commun. Clouzot veut filmer Picasso au travail. « C’est une bonne idée, reparlons-en », botte souvent en touche le peintre espagnol. Quelques années plus tard, c’est pourtant Picasso qui propose à Clouzot de lui écrire un scénario. « Chacun a sa place », rétorque le réalisateur. Au printemps 1955, les deux hommes se mettent enfin d’accord. Le mystère Picasso, filmé depuis l’envers d’une toile travaillée par le grand peintre, déconcertera beaucoup les spectateurs de l’époque qui espéraient voir un authentique documentaire sur Picasso. Or, le peintre n’apparait quasiment pas. Présenté au Festival de Cannes 1956, Le mystère Picasso recevra le Prix Spécial du Jury. Cette fois-ci, Picasso monte les marches en smoking et… chapeau melon. A l’instar de Clouzot, ils seront nombreux à rêver de Picasso au cinéma. On recense plus de 160 films sur le peintre !
L’ami de Jean Cocteau
Jean Cocteau, le cinéaste poète, voit en Pablo Picasso le touche-à-tout brillant, un frère, un complice. Les deux hommes seront amis pendant 48 ans, comme l’atteste leur correspondance parue chez Gallimard en mai 2018, même si des brouilles les séparent parfois. En 1960, le peintre accepte de participer à l’aventure du Testament d’Orphée que tourne Jean Cocteau avec Jean Marais, Maria Casarès, François Périer et le débutant Charles Aznavour. Jean Cocteau incarne le poète, tandis que Picasso se fait acteur et interprète l’ami d’Orphée dans ce testament autobiographique.
La muse de La Nouvelle Vague
Sa recherche picturale vient faire écho à celle de nombreux cinéastes et notamment celle de la Nouvelle Vague. Jean-Luc Godard et François Truffaut par exemple, ont utilisé des œuvres de Picasso dans certains de leurs films, pour mettre en valeur le trait de caractère d’un personnage ou un élément clé de la narration. Dans Jules et Jim, on ne compte pas moins de treize tableaux qui viennent faire écho à certaines scènes comme L’étreinte. Dans Pierrot le fou, Godard utilise la peinture de Picasso comme première référence. Agnès Varda, quant à elle, utilise le procédé du tableau vivant dans Lion’s Love (… and Lies) (1969), invitant ses acteurs à poser nus pour imiter un dessin de Picasso de la Suite Vollard.
L’exposition Quand Fellini rêvait de Picasso se tient jusqu’au 28 juillet à la Cinémathèque française à Paris.