La carrière d'Yves Montand - Ivo Livi lorsqu'il arrive à Marseille depuis sa Toscane natale - est une incroyable « success story ». Celle d'un « immigré rital » passionné par le cinéma, tour à tour danseur de claquettes et chanteur de cabaret dans un Paris occupé. Mais c'est avec le cinéma, et notamment son interprétation de Mario dans Le Salaire de la peur (1953) d'Henri-Georges Clouzot, que Montand devient une star internationale. La Cinémathèque française honore cette carrière d'acteur fructueuse du 2 au 20 décembre, avec la diffusion d'une vingtaine de longs métrages majeurs, des adaptations pagnolesques (Jean de Florette, Manon des sources) aux polars d'Alain Corneau (Le Choix des armes, Police Python 357). Plus qu'un simple gagne-pain, le cinéma était également un vecteur idéologique pour l'acteur, marqué par la fuite du totalitarisme mussolinien dans son enfance et par la seconde Guerre Mondiale. Issu d'un milieu communiste, Yves Montand devient le visage d'un cinéma politique à la fin des années 60 par sa collaboration avec Costa-Gavras. Il joue le rôle principal dans la trilogie du cinéaste franco-grec sur la dangerosité des extrémismes (Z, L'Aveu, État de siège). La projection de L'Aveu (1970) - où Montand endosse le rôle d'un vice-ministre broyé par les pratiques staliniennes aux côtés de son épouse Simone Signoret - sera d'ailleurs suivie d'une discussion avec Costa-Gavras le 4 décembre prochain.
Veine comique
La rétrospective s'ouvrira le 2 décembre sur le premier long métrage du président de la Cinémathèque française, Compartiments tueurs - film policier de 1965 où Yves Montand joue le rôle d'un inspecteur chargé d'élucider des meurtres en cascade. Il partage l'affiche de ce thriller hitchcockien avec Michel Piccoli, Simone Signoret et Jean-Louis Trintignant, entre autres. Le cinéaste Jean-Paul Rappeneau fera aussi le déplacement pour présenter son film Le Sauvage (1975), parfaite illustration du visage facétieux de l'acteur. Un Montand dans la force de l'âge donne la réplique à Catherine Deneuve dans cette comédie sur l'aventure et la superficialité de la vie urbaine. Les spectateurs pourront également se délecter de son autre collaboration avec Rappeneau (Tout feu, tout flamme), mais aussi de ses rôles chez Sautet (César et Rosalie, Vincent, François, Paul et les autres) et Melville (Le Cercle rouge). Même si les sixties et seventies marquent l'apogée de la carrière d'Yves Montand, il reste essentiel de le découvrir à ses débuts dans Les Portes de la nuit (1946) de Marcel Carné. Sortie juste après Les Enfants du paradis (1945) et scénarisée par Jacques Prévert, cette tragédie poétique d’après-guerre laisse déjà entrevoir un Montand fidèle à lui-même : résistant et amoureux transi.