Les yakuzas prennent leurs quartiers d’été à l'Institut Lumière du 22 juin au 15 juillet prochain. Avec cette rétrospective, le temple du cinéma lyonnais rend hommage aux mafieux du « jitsuroku eiga », un genre qui connaît son apogée dans les années 1970. Popularisé par des cinéastes japonais tels que Kinji Fukasaku, Yasuo Furuhata et plus récemment Takeshi Kitano, ces films de gangsters se démarquent par leur réalisme quasi-documentaire et la surenchère de violence qui les habite. Le cycle s’est ouvert ce mercredi 22 juin avec la projection de Femmes de Yakuza d'Hideo Gosha (1986), dans lequel l'épouse d'un ponte mafieux est propulsée à la tête de son empire suite à son emprisonnement. Célèbre pour son exploration artistique de la prostitution et de la libération des mœurs dans les années 1980, Hideo Gosha filme ici une anti-héroïne redoutable, régnant d'une main de fer sur un monde d'hommes. Énorme succès au box-office, ce long métrage basé sur les écrits controversés de Sh?ko Ieda (Gang Wives, 1986) donnera lieu à plusieurs suites dont Gokudo no onna-tachi: Kejime (1998) de Sadao Nakajima et Yakuza Ladies: Burning Desire (2005) de Hajime Hashimoto.
Les deux autres longs métrages présentés dans ce cycle sont l'œuvre d'un cinéaste fondateur du « jitsuroku eiga », Kinji Fukasaku, principalement connu pour avoir dirigé Takeshi Kitano dans le sanglant Battle Royale (2000). Fin observateur des mutations de la société japonaise d'après-guerre, Fukasaku a largement contribué à la désacralisation de la figure du yakuza. Ses films ne représentent plus ces gangsters comme les honorables héritiers des samouraïs mais comme de vulgaires truands, obsédés par l'appât du gain. Il entame cette entreprise de démythification en 1971 avec Guerre des gangs à Okinawa, dans lequel il dirige le prolifique K?ji Tsuruta, comédien indissociable du « yakuza-eiga ». Ce dernier y interprète un chef de clan qui, après dix années derrière les barreaux, tente de rebâtir un empire criminel sur l'île d'Okinawa. Deux ans plus tard, Fukasaku réalise la matrice du « yakuza flick » moderne, Combat sans code d'honneur avec Bunta Sugawara et Hiroki Matsukata. Sur les décombres du Japon post-Hiroshima, Kinji Fukasaku filme la résurgence d'un (dés)ordre criminel où le cynisme et la violence ont éclipsé l'honneur. Ce film brutal et sans concession sera diffusé à quatre reprises au cours de la rétrospective Yakuza !, tout comme les deux autres longs métrages sélectionnés.