Les participants ont été accueillis par Thierry Frémaux, directeur de l’Institut Lumière, qui a rappelé l’engagement et le soutien de l’institut auprès des partenaires culturels et d’éducation à l’image pour favoriser les actions pédagogiques envers les plus jeunes.
Cette introduction a été suivie par l’intervention d’Olivier Henrard, directeur général délégué du CNC, qui a souligné la nécessité de valoriser le film documentaire en prenant en compte le bilan de l’étude sur le documentaire réalisée par le CNC (étude précisée ci-après). Rémi Lainé, président de la Scam (Société civile des auteurs multimédia), également réalisateur de films documentaires, a quant à lui précisé le rôle que les plateformes doivent jouer dans la découverte du genre. Directeur régional des affaires culturelles (DRAC) d’Auvergne Rhône-Alpes, Marc Drouet a évoqué l’intérêt de travailler avec l’ensemble des partenaires de l’Éducation nationale et du ministère de la Culture autour de l’éducation à l’image. Enfin, Valérie Perrin, déléguée académique aux arts et à la culture (DAAC) de l’académie de Lyon, a insisté sur le fait de valoriser le documentaire auprès des jeunes en leur donnant les outils pour arriver à se repérer dans le genre.
Le public du documentaire
Cécile Lacoue, directrice des études, des statistiques et de la prospective a démarré la journée par une présentation de l’étude du CNC sur le public du documentaire. Cette étude été réalisée afin de mieux comprendre les profils, les usages, les comportements et les attentes des consommateurs face au genre documentaire. L’objectif de la présentation est de se référer plus particulièrement aux réponses des jeunes de façon à mieux comprendre leur rapport au genre documentaire. La présentation cible trois tranches d’âge : 11-14 ans, 15-18 ans et 19-24 ans.
Comment aborder la réception du documentaire avec le jeune public ?
S’en est suivie une table ronde dédiée à la façon d’aborder la réception du documentaire avec le jeune public. Dans le dispositif d’éducation à l’image Ma classe au cinéma, les documentaires sont parfois délaissés par les enseignants car ils trouvent compliqué de s’en emparer par rapport aux fictions. Avec la prolifération des images et des supports, il est difficile d’identifier ce qu’est un film documentaire et de comprendre la diversité de ce genre. La « fictionalisation » du réel ou la porosité entre fiction et documentaire est de plus en plus fréquent (storytelling en politique, la télé-réalité, le développement des films biographiques et que les plateformes amènent à une standardisation des documentaires). Cela nécessite que cette question documentaire soit abordée avec les élèves.
Comment donner l’appétence du documentaire aux élèves ? Comment leur montrer sa force cinématographique ? Comment aborder un film comme celui de Wiseman, œuvre majeure du cinéma, en même temps très éloignée des élèves ? Comment résoudre ce décalage ? En Seine-Saint-Denis, Cinémas 93 programme toujours un quatrième film documentaire ou un programme de courts métrages dans lequel on retrouve nécessairement des films documentaires. Stéphane Coulon, enseignant, a souvent pu constater un décalage entre l’appréhension des enseignants vis-à-vis de ce genre et la réception des élèves, finalement souvent enthousiastes.
Pour le dispositif Lycéens et apprentis au cinéma (LAAC) en Région Auvergne-Rhône-Alpes, un documentaire est proposé chaque année aux enseignants parmi neuf longs métrages. Si les documentaires sont les films les moins programmés par les enseignants, quand ils le sont, on remarque qu’ils fonctionnent plutôt auprès des élèves.
Marion Sommermeyer, exploitante et présidente de l’association régionale du groupement régional d'action cinématographique (GRAC), a exprimé sa difficulté, en tant qu’exploitante, de faire venir du public – et en particulier un public jeune – pour voir du documentaire en salles. Si le nombre de sorties de films documentaires a considérablement augmenté ces dernières années (environ 20 % des sorties), ces films ne représentent qu’1.7% de la fréquentation. C’est le plus souvent dans le cadre scolaire que les jeunes découvrent le documentaire. Ma classe au cinéma et la mise en place de médiateurs dans les salles sont deux bons vecteurs.
Yves Jeuland, réalisateur, a rappelé l’importance de parler de « film documentaire » plutôt que documentaire et de parler de réalisateur plutôt que de « documentariste », terme qui les classerait en dehors de la catégorie des réalisateurs.
Stéphane Coulon a rapporté que, lorsqu’il commence à parler de documentaire avec les élèves, il part d’abord de ce que cela représente pour eux. Pour les élèves, le documentaire, c’est d’abord : « le réel », « la vérité » et le fait que les acteurs jouent leur propre rôle à l’écran. A partir de ces constats, il discute ensuite de la notion d’acteurs, de la manière de passer du statut de personne à personnage. Un autre angle d’attaque consiste à leur dire que le film documentaire, c’est le préexistant. Il est aussi intéressant d’aborder le film documentaire via les films hybrides et d’explorer les diverses façons d’envisager la fabrication d’un film (grande équipe ou pas, scénario ou pas).
Lucile Gybels, coordinatrice Lycéens et apprentis au cinéma pour les académies de Grenoble et Lyon, a expliqué que le documentaire ne se limite pas à un sujet précis et qu’il n’est pas purement objectif puisqu’il s’agit avant tout du point de vue d’un auteur. Le documentaire offre un espace de liberté très grand, qui permet une diversité peut-être plus importante que la fiction, liés à ses canaux de production moins contraignants. Le partage d’extraits avec les élèves est toujours utile pour les amener à connaitre le documentaire. Passer par la pratique est aussi un bon vecteur, complémentaire pour appréhender ce genre. Un atelier autour de l’autoportrait est par exemple un dispositif assez facile et une bonne entrée en matière à mettre en place avec les élèves.
Yves Jeuland a rappelé l’importance de la salle de cinéma pour donner envie aux jeunes de voir des films documentaires car elle offre une expérience collective. Les festivals sont aussi un très bon levier. Pour faire comprendre ce qu’est le film documentaire, il faut expliquer que les notions de subjectivité et de point de vue sont constitutives de ce genre. Il faut préciser que l’affirmation d’un point de vue ne signifie pas assener une vérité. On devrait sortir d’un documentaire sans avoir l’impression d’avoir toutes les réponses mais au contraire en se posant plus de questions. Pour lui, « un documentaire ne traite pas un sujet, il raconte une histoire ». En ce sens, on se rapproche plus de la fiction que du reportage.
Jean-Marie Barbe, producteur et porteur de projets dans le milieu du cinéma documentaire, a expliqué que, dans le cadre du Master de réalisation de Lussas, il commence toujours par intervenir sur les fondamentaux, sur les notions de frontière entre le documentaire et la fiction. Le documentaire, c’est ce qui ne se rejoue pas. Le documentaire soulève la question de l’éthique, de la distance à l’autre, de ce qu’on peut montrer ou pas (mettre en péril ou pas la personne filmée). C’est en quelque sorte la mort qui peut fonder la différence entre le documentaire et la fiction. Former les étudiants à Lussas, c’est former autant de futurs ambassadeurs pour la culture et la diffusion du documentaire. Depuis la création de l’école du documentaire à Lussas, aux côtés des Etats Généraux du film documentaire, c’est près de 300 jeunes qui ont été formés en 25 ans.
Pour Stéphane Coulon, les formations en présentiel dans le cadre de Ma classe au cinéma sont essentielles pour les enseignants. On a pu voir depuis le Covid à quel point le distanciel était totalement inopérant. « La volonté d’aller voir ailleurs » est sans doute une des particularités du documentaire. Le cinéma documentaire va amener les élèves à se poser des questions. C’est d’ailleurs souvent avec ces films qu’on observe les débats les plus passionnants avec les élèves. La nouvelle génération d’enseignants beaucoup est beaucoup moins aguerrie au cinéma que la génération précédente. Cela nécessite de revoir la manière dont on aborde les œuvres.
Alban Jamin, chargé de mission cinéma, à la Délégation académique aux arts et à la culture de l’académie de Lyon, a souligné à son tour que le documentaire n’est plus fléché comme objet d’étude dans les programmes de spécialité au bac depuis la réforme du lycée. Les participants y voient une évolution positive – le documentaire n’est pas à part des autres films – en même temps qu’une évolution négative où le risque est de se cantonner uniquement au genre majeur qu’est la fiction.
Lucile Gybels a quant à elle insisté sur l’importance de favoriser les échanges avec les élèves plus qu’une explication verticale.
Yves Jeuland a ajouté que l’usage des plateformes démontre que « plus on a de choix et plus on va vers ce qu’on connait. » Il est donc important que l’école éveille les enfants, les ouvre au champ des possibles, notamment avec le film documentaire.
Jean-Marie Barbe a constaté que, depuis les 20 dernières années, on assiste à de plus en plus de porosité entre les formes, notamment entre documentaire et animation. Valse avec Bashir a constitué un tournant dans l’évolution du genre documentaire. C’est peut-être une entrée pour explorer le documentaire avec les jeunes.
Comment développer l’esprit critique ?
L’après-midi a débuté par une conversation avec la déléguée académique aux arts et à la Culture de l’académie de Lyon, Valérie Perrin, et Alban Jamin autour de leur dispositif projet à la Délégation académique aux arts et à la culture.
L’académie de Lyon a la chance de bénéficier d’un niveau de soutien fort et constant en faveur de l’éducation artistique et culturelle de la part du recteur. Ce cadre favorable permet d’inventer et de porter des projets, notamment au long cours, comme celui présenté aujourd’hui.
La Délégation académique aux arts et à la culture (DAAC) s’est demandé comment penser une logique de programmation pédagogique comprenant différentes formes de formations, divers types de modules ? Dans ce cadre, elle a souhaité engager une réflexion au long cours autour de la question suivante : Comment développer l’esprit critique ? Le cinéma documentaire se prête particulièrement à cette problématique qui s’envisage sur le temps long, nécessite du recul et un bilan critique. Le documentaire s’est aussi imposé car il est peu connu des élèves comme des enseignants, réduit à des formes stéréotypées (tel que le reportage), appréhendé de manière confuse, trop cantonné aux festivals d’initiés.
Il existe une trentaine de Pôles de Ressources pour l’Éducation Artistique et Culturelle (PRÉAC) au niveau national dont trois qui concernent le cinéma. C’est ce qui correspond dans le jargon de l’éducation nationale à la formation de formateurs.
L’académie de Lyon coordonne un PRÉAC cinéma qui se concrétise tous les deux ans par l’organisation d’un séminaire national. Le PRÉAC cinéma a une coloration patrimoniale évidente même s’il croise aussi avec la création contemporaine. Il aborde les grandes notions du cinéma
Le PRÉAC documentaire de Lyon consiste en un séminaire national organisé en avril 2024 sur trois journées en partenariat avec l’Institut Lumière, La Cinéfabrique, le cinéma Le comedia, etc. Autant de structures culturelles et de sites que les stagiaires pourront rencontrer. L’enjeu est de rassembler un public mixte où les enseignants échangent avec des acteurs culturels et d’engager la possibilité d’un travail collaboratif et d’échanges de bonnes pratiques.
Les écoles académiques de formation continue (EAFC) proposées au niveau académique recouvrent 25h de formation chaque année pour les enseignants proposé dans par la DAAC en 2024. Parmi les dispositifs mis en place, un parcours DAAC pour des projets de classe sur la réalisation d’un documentaire (10h d’accompagnement), la création d’un concours du film documentaire des élèves autour d’un projet de 10mn réalisé autour d’une thématique collective et la projection des cinq sujets finalistes avec une remise de prix lors du Festival de l’EAC du 7 au 9 juin 2024. Les établissements vont valoriser toutes les production d’éducation artistique et culturelle des élèves réalisés au cours de l’année.
Accompagner les élèves dans des travaux de réalisation de documentaire
L’après-midi s’est poursuivie par une table ronde autour du geste documentaire avec le jeune public.
Comment évoquer avec un public jeune les grandes notions théoriques de l’écriture et de la réalisation d’un documentaire, mais aussi aborder l’exercice via des angles très pragmatiques comme le choix d’un sujet, la collecte d’information, la question du repérage ou les choix de mise en scène, ainsi que la question du rapport au temps, l’immersion – parfois au long cours – qui participe du geste documentaire.
Il s’agit de partager des récits d’expériences de la part des professionnels du cinéma qui ont accompagné des élèves dans des travaux de réalisation et d’entendre le rôle et l’importance des structures culturelles dans cette dynamique. Il s’agit aussi de s’intéresser au geste documentaire via le partage d’extraits de films choisis par les intervenants.
Caroline Capelle, réalisatrice de Dans la terrible jungle, Cécile Morin, chargée de mission actions éducatives collège et formation professionnelle au Cinémas 93, et le réalisateur Maxence Voiseux ont participé à cette table ronde.
Après des études à l’ENSAD Paris, Caroline Capelle et Ombline Ley ont filmé des jeunes pendant 18 mois. Elles sont parties sans aucun budget, aucun cadre, et ont obtenu une aide à la post production (montage) à Périphérie. Puis le film est sélectionné à l’ACID. Dans la terrible jungle a suscité de nombreuses sollicitations dans le domaine de l’éducation à l’image. À partir de là, elles ont eu plusieurs expériences d’ateliers de pratiques dans des collèges, des lycées et avec Le Bal à Paris.
Elles ont révélé que leur première expérience a été formatrice mais parfois compliquée : elles ont suivi six classes de 30 à 35 élèves avec parfois des enseignants absents pendant les interventions. Entrer en contact avec des élèves, sans expérience de la pédagogie, a nécessité d’inventer des techniques par elles-mêmes pour établir une relation de confiance avec les élèves, se faire accepter. Or, il est important que les enseignants soient impliqués dans l’accompagnent de ces projets pour que cela se passe bien. Leur rôle est complémentaire à celui de l’enseignant qui peut aider de son côté à garantir que même dans le cadre d’un atelier, la discipline s’impose et soit comprise.
Dans le cadre de leur pratique, elles ont, à titre d’exemple, pu proposer des ateliers sur le vrai et le faux (« documenteur ») en passant des extraits issus de tout type de média et en proposant des quizz, ce qui a très bien marché avec les élèves. L’étape du tournage est toujours révélatrice et permet de mettre en pratique ce qui a pu être abordé préalablement de manière plus théorique.
Maxence Voiseux a souvent tourné, dans le nord de la France dont il est originaire, des films documentaires en lien avec sa famille, avec la transmission, l’émancipation.
Ayant obtenu une aide à l’écriture de la région IDF – celle-ci étant conditionnée à l’intervention du réalisateur et à la mise en place d’une résidence d’artiste dans une institution publique –, il a proposé un atelier d’éducation artistique et culturelle dans un lycée à Villepinte (Seine-Saint-Denis). Cet atelier s’est inséré dans le programme d’une option histoire de l’art. Maxence Voiseux a évoqué le manque d’accompagnement dans la mise en place du projet depuis l’obtention de l’aide au niveau régional jusqu’à son arrivée au sein du lycée, où les enseignants lui ont réservé un accueil inégal. Il a dû se débrouiller seul pour organiser l’atelier, trouver sa place au sein de l’institution, comprendre comment être en résonance avec un parcours pédagogique donné.
La mise en place d’un atelier de pratique suppose de se demander ce qu’on peut apporter aux élèves et implique un nécessaire travail de vulgarisation. Au départ, les grandes notions documentaires sont inaudibles par les élèves. Avant de s’embarquer dans la théorie, il faut commencer par aborder très concrètement ce qu’est une image.
À l’époque, le documentaire d’Angèle venait de sortir sur Netflix. Cela a constitué une base pour expliquer en quoi ce qui était une référence documentaire pour les élèves ne l’était peut-être pas tant que cela.
Cécile Morin est chargée de mission actions éducatives collège et formation professionnelle à Cinémas 93. Elle contribue à l’organisation et au relais entre les enseignants et les intervenants afin de garantir la mise en œuvre de ce genre de projets dans les meilleures conditions possibles. La Seine-Saint-Denis a la particularité d’encourager la mise en œuvre de nombreux ateliers, d’initiatives autour du cinéma documentaire en lien avec le territoire.
L’objectif de Cinémas 93 est de constituer un parcours de spectateur idéal, de la crèche à la terminale.
Ils coordonnent également un dispositif pré-professionnalisant, L’Atelier ainsi que l’aide au film court. Pour ce qui concerne les ateliers de pratique, Cécile Morin est là pour accompagner, faire se rencontrer les protagonistes, réajuster les aspects d’un projet en fonction des enjeux scolaires, de la réalité d’une classe pour valoriser ce qui a été réalisé en organisant des restitutions (en salle de cinéma si possible). A noter que la restitution n’est pas une finalité : il faut valoriser dès le début du projet sans mettre de pression sur le résultat.
Parmi les actions proposées par Cinémas 93 :
- Un dispositif proposé par la structure : 20h d’intervention d’un artiste + 10h de sortie culturelle + 10h de formation des profs.
- Un dispositif L’atelier avec Coté Court (4 réalisateurs avec des projets)
- Un atelier avec des détenus
- Un film d’atelier hors temps scolaire projeté en avant séance de The Fits dans le cadre de Culture au collège (CAC).
Cécile Paturel, réalisatrice de contenus pédagogiques et professeur de cinéma, était la modératrice de cette table ronde. Elle a proposé de voir comment aborder le geste documentaire par le prisme d’extraits choisis par les réalisateurs afin d’entrer concrètement dans des exemples d’analyse.
Extrait d’Ultras, réalisé par Maxence Voiseux
L’extrait projeté montre un personnage de prêtre dans toute sa dimension réflexive et sociale.
Comment mettre en scène sa parole ? Comment rendre compte de cet homme à la forte dimension sociale, qui ne fait pas l’économie de réflexions, qui organise des groupes de paroles, réfléchit énormément au-delà de sa fonction. Le réalisateur part d’une pratique rituelle de son personnage : il s’enregistre régulièrement à l’aide d’un dictaphone. Maxence Voiseux propose au prêtre de le filmer en train de s’enregistrer pour capter le personnage au plus près, casser le côté très protocolaire de l’entretien, et être à bonne distance, respecter sa pudeur. Le dispositif retenu est aussi un moyen de véhiculer de l’émotion. Dans le documentaire, le lien avec les personnes, le respect mutuel est essentiel. Comme la caméra peut faire un peu peur, c’est une manière d’acceptabilité : ça devient une sorte de contrat moral entre le réalisateur et la personne filmée.
Extrait de Dans la terrible jungle, réalisé par Caroline Capelle et Ombline Ley
L’extrait projeté montre une jeune femme marchant au loin et ayant une conservation téléphonique. Comment mettre en scène le son ? Comment permettre au spectateur d’être à la fois loin du personnage et proche de lui ? Les réalisatrices ont eu recours au gros plan sonore.
L’extrait permet de pointer la part de mise en scène. Les réalisatrices se sont basées sur l’observation qu’elles avaient pu faire de la jeune femme dans son quotidien. Elles ont reproduit le type d’appels téléphoniques qu’elle pouvait avoir avec ses parents dans le parc de l’Institut médicaux éducatif (IME). L’appel dans la scène est une reconstitution.
Extrait de Voyage de rêve, projet mené par la réalisatrice Aline Fisher à la Courneuve sur les hospitalités
Au départ, il s’agissait de provoquer une rencontre entre les migrants à La Chapelle et une classe, un objectif impossible et impensable. Il a fallu adapter le projet et s’appuyer sur un médecin de Médecin sans frontière dont la mission est de faire des maraudes. Le dispositif retenu a été de le faire venir avec son camion dans le collège. Tandis qu’il jouait son propre rôle, les élèves ont interprété des situations de migrants à travers la reconstitution d’un camp dans l’enceinte de l’établissement scolaire. D’autres, selon les motivations, ont pu participer au projet en occupant des fonctions techniques au moment du tournage.
Maxence Voiseux a conclu cette table ronde en insistant sur l’importance de transmettre la notion de la multiplicité des écritures et des possibles aux élèves. Il a rappelé que le film ne montre jamais qu’une facette d’une personne dans la vraie vie. Cela répond d’un parti pris, d’un point de vue propre au réalisateur. C’est une manière de représenter le réel qui a aucun moment ne peut avoir la prétention d’être objectif et omniscient.
La journée d’échanges s’est achevée par la projection du Sel de la terre de Wim Wenders, dans le cadre de l’Année du documentaire 2023.