Dix choses que vous ne saviez (peut-être) pas sur « Le Parrain »

Dix choses que vous ne saviez (peut-être) pas sur « Le Parrain »

30 mars 2022
Cinéma
Le Parrain
Le Parrain DR

Retour sur la fabrication du chef-d’œuvre de Francis Ford Coppola, alors que celui-ci fête ses cinquante ans.


L’intrigue aurait dû se dérouler dans les années 70

Pendant la préparation du film, le directeur de la production de la Paramount, Robert Evans, avait décidé de moderniser l’action du roman de Mario Puzo et de la situer à l’époque contemporaine. Mais Francis Ford Coppola estimait que le film aurait plus de force s’il se déroulait dans l’Amérique de l’après-guerre. Il finit par obtenir gain de cause et le budget du film, en conséquence, passa de 2,5 à 6 millions de dollars.

Marlon Brando s’est inspiré du mafieux Frank Costello pour créer Vito Corleone

Pour inventer le personnage de Vito Corleone, le romancier Mario Puzo s’était inspiré de plusieurs fameux gangsters italo-américains, de Carlo Gambino à Lucky Luciano. Mais pour lui donner vie à l’écran, Marlon Brando s’est surtout intéressé à Frank Costello, parrain de la famille Luciano, qu’il avait pu observer dans les « Kefauver Hearings », ces auditions d’une commission d’enquête du Sénat sur le crime organisé en Amérique, retransmises à la télévision dans les années 50, et dont Coppola avait fait parvenir les enregistrements à l’acteur. Celui-ci avait surtout été frappé par la voix douce et rauque du mafieux, un timbre qui lui avait fait comprendre, comme il l’expliquera, que « les vrais hommes de pouvoir n’ont pas besoin de parler fort pour se faire respecter. »

Alain Delon aurait pu être Michael Corleone

« Quand je le regarde, je vois la carte de la Sicile », avait l’habitude de dire Francis Ford Coppola pour tenter de convaincre ses interlocuteurs de la Paramount qu’Al Pacino, alors encore inconnu, était le bon choix pour le rôle de Michael Corleone. Mais Robert Evans tiquait devant la petite taille de l’acteur et aurait préféré des comédiens plus « bankables », comme Ryan O’Neal, Warren Beatty, Robert Redford ou Jack Nicholson. Il ira même jusqu’à songer faire appel à son ami Alain Delon : « C’est comme cela qu’il était décrit dans le livre », racontera-t-il plus tard, avant de reconnaître son erreur de jugement sur Pacino : « Je me trompais. »

Robert De Niro a failli jouer deux rôles dans le film
Alors débutant, Robert De Niro avait auditionné pour le rôle de Sonny Corleone, finalement tenu à l’écran par James Caan. Cette audition fut suffisamment marquante pour que la production lui propose le rôle de Paulie, l’un des hommes de main de Don Corleone. De Niro déclina, préférant tourner la comédie mafieuse The Gang that couldn’t shoot straight, où il reprit le rôle que devait tenir un certain… Al Pacino, qui venait d’être choisi pour incarner Michael ! De Niro se rattrapa deux ans plus tard, en portraiturant Vito Corleone dans ses jeunes années dans Le Parrain, 2ème partie.

George Lucas a aidé à la réalisation
Au moment du tournage du Parrain, l’amitié entre Francis Ford Coppola et George Lucas remontait déjà à quelques années. Les deux hommes s’étaient rencontrés sur un plateau de la Warner, quand Lucas était venu faire un stage d’observation sur le tournage de La Vallée du bonheur (1968), une comédie musicale avec Fred Astaire mise en scène par Coppola. Pour donner un coup de main à son ami, le futur réalisateur de Star Wars monta la séquence musicale relatant la guerre des gangs qui suit le meurtre de Sollozzo, et filma quelques inserts sur des manchettes de journaux.

S’il y a autant d’oranges dans le film, c’est à cause du chef décorateur Dean Tavoularis

Les oranges abondent dans Le Parrain : Don Corleone en achète à un vendeur de fruits et légumes avant de se faire tirer dessus en pleine rue ; il en met une dans sa bouche pour faire rire son petit-fils ; on en voit sur la table à manger du producteur Jack Woltz, etc. Si certains commentateurs ont voulu y voir un symbole, le présage d’une mort imminente, la raison de leur présence est beaucoup plus pragmatique que ça : le production designer Dean Tavoularis (qui entamait ici une collaboration de plusieurs décennies avec Francis Ford Coppola) estimait que les oranges offraient un contraste intéressant dans des scènes pour la plupart plongées dans une épaisse obscurité.

Dans une scène coupée, Michael Corleone tuait l’assassin de sa femme

La scène n’est pas dans le film, mais l’image de Michael Corleone, un fusil à la main, coiffé d’un chapeau blanc, fut néanmoins largement diffusée pendant la promotion du Parrain, en 1972. On y voyait le personnage joué par Al Pacino, dans une pizzeria, tuer son ancien garde du corps sicilien, Fabrizio, responsable de la mort de sa première femme, Apollonia.

La célébrissime bande originale a été composée pour un autre film

Signée Nino Rota, la musique du Parrain a bien sûr énormément fait pour la renommée du film. Mais le complice de Fellini recyclait en réalité pour Coppola un vieux thème, écrit à la fin des années cinquante, pour la comédie Fortunella (Eduardo De Filippo, 1958). Il fut en conséquence disqualifié de la course aux Oscars, et sa nomination fut attribuée à John Addison, pour la musique du Limier, de Joseph L. Mankiewicz.

Francis Ford Coppola a remporté un Oscar pendant le tournage

Coppola a souvent raconté qu’il avait failli être renvoyé plusieurs fois du tournage du Parrain, par des producteurs peu enthousiasmés par les rushs du film et ses méthodes peu conventionnelles. En avril 1972, alors que le tournage a commencé deux mois plus tôt et que le réalisateur est toujours sur la sellette, la cérémonie des Oscars lui apporte un peu de répit : il remporte l’Oscar du meilleur scénario pour Patton, le film de guerre qu’il a écrit pour Franklin J. Schaffner. Depuis New York, il regarde la cérémonie avec son ami Martin Scorsese, qui le rassure : « Ils ne peuvent pas virer quelqu’un qui vient de gagner un Oscar. »

Avant Marlon Brando, George C. Scott avait lui aussi refusé un Oscar

Marlon Brando a beaucoup fait parler de lui lors de la 45ème cérémonie des Oscars, le 25 mars 1973, en refusant son Oscar du meilleur acteur, en signe de protestation contre la mauvaise représentation des Amérindiens dans le cinéma américain et le mauvais traitement que leur réservait le gouvernement. Mais on a tendance à oublier que deux ans plus tôt, George C. Scott avait été le premier acteur de l’histoire à refuser un Oscar, celui de la meilleure interprétation masculine pour Patton – il voulait dénoncer ainsi la corruption de l’Académie. Etonnamment, les deux films dans lesquels brillaient ces rebelles étaient tous les deux signés Francis Ford Coppola !

Le Parrain, de Francis Ford Coppola, actuellement en salles, et en Blu-ray 4K Ultra HD (Paramount/ESCD)