Jour2Fête en mode VOD

Étienne Ollagnier : La période du premier confinement nous a donné du temps pour nous poser et aller au bout d’un processus entamé en 2016 quand on a créé sur Facebook une communauté autour du documentaire Merci patron ! de François Ruffin, que nous avions distribué. L’an passé, nous sommes passés à la vitesse supérieure en agrégeant les communautés des différents films engagés dont nous nous étions occupés sous une bannière unique « Les films qui font débat ». Progressivement, cette communauté a grossi pour arriver à 55 000 membres aujourd’hui. Pendant le premier confinement, on a organisé pas mal de projections virtuelles, de débats en ligne sur différentes plateformes… Et peu à peu, s’est précisée cette envie de faire venir progressivement cette communauté Facebook vers notre propre média social, une plateforme où, finalement, la VOD ne serait qu’accessoire pour mettre principalement en avant ces débats autour de nos films.

Cela fait longtemps qu’on avait envie de trouver un moyen de prolonger l’accompagnement de nos sorties en salles et des débats qu’on organise à ces occasions avec les réalisateurs, notamment autour de nos films les plus militants comme Un pays qui se tient sage. Le premier confinement a accéléré notre réflexion.

Sarah Chazelle

Sarah Chazelle : On a fait appel à plusieurs prestataires et choisi la formule la plus personnalisable possible afin qu’on puisse la développer au fur et à mesure, au rythme de nos envies. Cette plateforme n’est pas un autre métier, mais la continuation du nôtre. Et même si on espère ne jamais revivre la période que nous subissons, on anticipe aussi le fait que, dans les mois qui viennent, la durée de vie des films sera sans doute réduite dans les salles.

Sarah Chazelle : Dans un premier temps, on met en effet en avant et on communique sur ceux qui font débat. Puis on élargira avec ce but de faire vivre le plus possible nos films indépendants – aux budgets souvent restreints mais qui intéressent des publics très divers – par-delà leur parcours en salles.

Cette plateforme repose sur trois grandes parties avec des accès différents : le noyau dur, avec les débats autour de nos films récents ou plus anciens et l’organisation d’événements récurrents en compagnie de leurs réalisateurs ; un espace réservé à l’actualité, aux sorties VOD de Jour2Fête, et enfin une partie internationale qui fut d’ailleurs un élément moteur dans la décision de nous lancer.

Étienne Ollagnier

Étienne Ollagnier : Après l’acquisition de Docs & Film International, on est devenus une société de ventes internationales importante sous la bannière The Party Film Sales. Sur notre plateforme, nous organisons des marchés virtuels et des événements autour des films dont on s’occupe à travers des échanges avec les acheteurs et les talents concernés aux quatre coins du monde.

Sarah Chazelle : Cette partie internationale aura deux vocations. Discuter avec les distributeurs des différents pays, mais aussi la possibilité, à terme, d’avoir accès en VOD à des films qui n’auraient pas été vendus dans certains territoires. Cela fait partie de nos envies pour le futur.

Étienne Ollagnier : On pourrait aussi envisager d’accueillir des films qui ne seraient pas distribués par Jour2Fête mais vendus par The Party Sales et distribués par d’autres. Avoir développé un outil comme cette plateforme nous inspire énormément d’idées à long terme. Ainsi, pour accompagner la sortie des documentaires qu’on va proposer en salles quand elles rouvriront, on va développer un certain nombre de ramifications sur notre plateforme, toutes liées aux messages portés par ces œuvres. Leur engagement pousse à l’action.

Étienne Ollagnier : On a organisé quatre débats autour d’Un pays qui se tient sage de David Dufresne pour accompagner sa sortie en DVD et en VOD. Des événements suivis à chaque fois par 1 200 ou 1 300 personnes.

Sarah Chazelle : On en a fait un autour de Deux avec le réalisateur Filippo Meneghetti (dont The Party Sales est en charge des ventes internationales), juste avant la cérémonie des César et sa victoire dans la catégorie « meilleur premier film », avec une partie chat qui a très bien fonctionné, permettant à tous les gens connectés de poser leurs questions. Enfin, on en a organisé un autre autour de Douce France, un documentaire [le récit initiatique sur l’éveil de la conscience politique et environnementale de trois lycéens de Villepinte, NDLR] qu’on sortira en salles en 2021. Ce débat réunissait son réalisateur Geoffrey Couanon, des exploitants de salles et des représentants d’une dizaine d’associations qui ont présenté leur travail, mais aussi la manière dont elles interviendraient au moment de la sortie du film.

Étienne Ollagnier : Ce qui est intéressant dans le cas de Douce France, c’est qu’on n’a pas diffusé le film mais juste parlé de lui, des valeurs d’engagement qu’il porte et de ce qu’on peut créer autour de lui. Dans les semaines qui viennent, on va faire un bilan de ces premières expériences plus que prometteuses pour construire la suite. Car ces tests grandeur nature confirment nos intuitions premières.

Étienne Ollagnier : Une convention avec les exploitants pour leur montrer les cinq films qu’on sortira en salles à partir de la réouverture, leur présenter notre stratégie autour de chacun d’eux et échanger avec eux.