Quelle était la ligne directrice dans la conception de cette exposition sur les comédies musicales ?
La première idée était d’imaginer un parcours totalement immersif et très ludique en collaboration avec le scénographe Pierre Giner. Dans un second temps, nous voulions prendre un peu de distance et nous intéresser à divers aspects de la fabrication d’une comédie musicale. Par exemple, « l’écriture de chansons » ou « la chorégraphie »… On attire l’œil du visiteur sur des points d’histoire comme « l’utilisation des décors naturels dans West Side Story ou « l’invention du mixage sonore au début des années 1930 ».
Il y a 145 extraits de comédies musicales dans cette exposition. Le genre est plus riche qu’on ne le pense…
Oui, et chaque extrait veut dire quelque chose. L’exposition s’ouvre sur un des films les plus aimés, Chantons sous la pluie.Nous avons mis en avant les numéros dansés car c’est ce qui est spectaculaire. Un danseur de claquettes, Fabien Ruiz, chorégraphe de The Artist interviendra dans l’exposition trois fois par semaine pour apprendre aux visiteurs quelques pas de danse. Ils pourront être filmés et se voir dans les décors de The Artist. Quand il n’est pas là, un tutoriel, conçu par lui, apprendra la même chose aux visiteurs. On dresse aussi un parallèle entre Fred Astaire et l’inspiration qu’il a suscitée chez Michael Jackson.
Quelle place occupe la France dans cet univers très hollywoodien ?
La France est présente à travers les comédies musicales de Jacques Demy. Ce réalisateur est très important car il a fait tomber des préjugés des Français contre le genre aussi bien dans la profession que parmi le public. Le visiteur va ainsi pouvoir découvrir les répétitions et la mise au point de la chanson des jumelles dans Les Demoiselles de Rochefort. Il y a également deux costumes de Peau d’âne. Jacques Demy est présent aussi dans l’influence qu’il a eue sur d’autres cinéastes, notamment Damien Chazelle.
Pourquoi les réalisateurs français font-ils si peu de comédies musicales ?
Ils en font peu, mais chaque réalisateur rêve d’en faire une. Les étudiants en cinéma font souvent des comédies musicales comme film de fin d’études. Et tous les acteurs rêvent de chanter et de danser dans un film. Mais c’est un genre très cher qui demande une immense préparation : il faut écrire la musique, préparer les numéros chorégraphiés, payer une équipe pendant une phase de répétitions assez longue… C’est pour cela que la comédie musicale est très liée au système des studios hollywoodiens à leur grande époque, lorsqu’ils avaient les moyens d’engager à l’année les multiples talents nécessaires à produire des comédies musicales. En France, les recettes des comédies musicales sont aléatoires. Du coup, les productions sont souvent plus intimistes, tournées en décors naturels. Mais l’engouement du public français pour la comédie musicale est en train de grandir à une vitesse exponentielle depuis quelques années, en partie grâce au théâtre. Les nouvelles générations adorent le genre bien plus que leurs parents. Cela devrait donc changer aussi les habitudes des réalisateurs.
Vous réservez une place aussi au cinéma bollywoodien qu’on connaît très mal en France…
A Bollywood (surnom donné à l’immense industrie cinématographique en Inde), tous les films sont musicaux, qu’il s’agisse d’un polar, un film de guerre ou une romance. Cela fait partie du spectacle qu’aiment les Indiens. Les stars de Bollywood sont de véritables idoles. Et les stars de la chanson qui post-synchronisent les stars de cinéma sont aussi très connues, alors que dans les autres pays on a plutôt tendance à plonger les doublures dans l’anonymat.
A la Philharmonie de Paris, l’exposition se décline aussi en concerts et en rencontres… Pouvez-vous nous en détailler certains ?
Il y a deux grands week-ends de concerts et d’ateliers, l’un au début du mois de novembre, et l’autre avant Noël. Nous aurons la chance d’accueillir l’épouse de Gene Kelly qui va venir présenter un ciné-concert de Chantons sous la pluie.
L’exposition offre-t-elle un parcours particulier pour le jeune public ?
Oui, il y a une salle plus particulièrement tournée sur la comédie musicale en dessin animé, dans laquelle les visiteurs peuvent répondre à un quiz. L’exposition en elle-même est très interactive. Outre le cours de claquettes, il y a un livre géant de costumes de Cyd Charisse reproduits à l’échelle 1, des chansons à écouter, des contenus à découvrir. Il y a aussi bien sûr des ateliers pour enfants et des visites guidées pour les scolaires.
« Comédie musicales, la joie de vivre au cinéma » à la Philharmonie de Paris. Cité de la Musique. 221 avenue Jean Jaurès. 75019 Paris.
Du 19 octobre au 27 janvier.