Une projection test, comment ça marche

Une projection test, comment ça marche

21 mars 2019
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Illustration salle de cinéma
Illustration salle de cinéma DR

S’il y a un aspect du processus de création cinématographique qui intrigue, ce sont bien les projections test. Qui les organise ? Dans quel but ? Qui y participe ? Les réponses de Nicolas Thevenin, distributeur chez SND, et Stéphane Hochberg de Do the right films.


Si aux Etats-Unis, le recours aux projections test est courant lors de la production de blockbusters, menant parfois à des « reshoots » lorsque les commentaires sont mauvais, c’est moins le cas en France. « En général, en France les projections test se font surtout sur des grosses comédies qui doivent être efficaces, explique Nicolas Thevenin. Des films à grand potentiel spectateur où il y a beaucoup de copies et donc d’enjeux. Bien évidemment, plus le film est calibré, plus on a tendance à faire des tests pour voir si le film fonctionne. »

Les projections test comme aide au montage

Dans le cas de comédies, les projections test peuvent se dérouler bien avant la sortie du film, et avoir un réel impact sur le montage final. « Dans un souci d’amélioration, on teste les films auprès d’un panel de spectateurs, pour voir les scènes qui fonctionnent, celles qui sont les plus drôles, les personnages les plus aimés etc. avec l’objectif d’optimiser le montage en fonction des retours. Souvent, c’est donc le producteur qui les initie » détaille Nicolas Thevenin.

Cette méthode a fait ses preuves. « Avec les comédies, ça peut vraiment faire la différence. On a vu des films transformés devenir de gros succès à force de tests et de modifications, alors qu’au départ les premiers retours étaient très moyens. Il y a une vraie valeur ajoutée de ces tests qu’il ne faut pas négliger. » Il faut alors que le réalisateur du film accepte, pas seulement de se prêter à cet exercice, mais surtout d’apporter des modifications en fonction des retours de ces projections. « Il y a évidemment des réalisateurs et des producteurs qui s’y refusent. C’est leur droit. »

Les projections test comme outil marketing

Le recours aux projections test permet également aux distributeurs de mieux travailler la sortie des films. « Le but est alors d’identifier au mieux à qui s’adresse le film, qui va l’aimer, afin de prévoir une campagne de promotion adaptée : comment construire l’affiche, décider quels sont les acteurs qui répondront aux journalistes, qui participera aux tournées en régions. Pour un distributeur, il n’y a rien de pire que de se tromper de cible dans le lancement d’un film », souligne le distributeur.

« En général, les spectateurs sont recrutés en fonction de leur affinité avec le film qui leur sera présenté. On prend également en compte l’avis du panel sur la star du film, quand c’est une personnalité marquante, explique Stéphane Hochberg, qui organise ces séances si particulières. Inutile de tester un film construit autour d’une star avec des spectateurs qui la détestent. »

Comment se passe une projection test

Les spectateurs ne savent jamais à l’avance quel film ils vont voir, avant de s’installer dans la salle. Question de confidentialité. Avant le début du film, on leur explique « les aspects confidentiels du procédé, rappelle Stéphane Hochberg, et à quelle étape en est la production du film. »
Une fois la séance terminée, vient alors le temps du recueil des avis, qui dure de 15 à 25 minutes. Les spectateurs répondent à de nombreuses questions. Et donnent leur sentiment sur tout : musique, décors, durée, personnages, intrigues et même des scènes entières.
« Le réalisateur est toujours associé à notre travail, de près ou de loin, confie le spécialiste. Parfois, c’est lui qui le demande. Certains réalisateurs, issus du monde de la scène ou de la télé par exemple, aiment travailler avec un retour du public. Il arrive que des réalisateurs nous aident à construire le questionnaire, car ils ont encore des interrogations au moment du montage… »

Une projection test, combien ça coûte

Il existe des sociétés spécialisées dans l’organisation de projections de ce type, telles que Médiamétrie ou Do The Right Film. Il faut compter « autour de 15 à 20 000 euros par projection », selon Nicolas Thevenin, même si évidemment de nombreux critères doivent être pris en compte comme le lieu de la projection, le nombre de participants, la méthode utilisée, la précision de l’étude… « Vu le budget total des films testés et des enjeux financiers, ce n’est donc pas excessif, juge le distributeur. Mais cela peut vite grimper si on multiplie les tests. Le nerf de la guerre, ce sont vraiment les spectateurs qui assistent à ces projections. Plus le panel est affiné, plus le résultat est intéressant, mais plus cela coûte cher. »