Les combats dans Paris brûle-t-il ? (1966)
La fresque historique franco-américaine de René Clément détaille la bataille pour la libération de Paris en août 1944. Tirée de l’enquête somme signée Larry Collins et Dominique Lapierre, elle détaille les dernières heures du Paris occupé. Le scénario est écrit, entre autres, par Francis Ford Coppola, Gore Vidal, Jean Aurenche et Pierre Bost. Grand maître du cinéma français d’après-guerre, René Clément a déjà traité la Deuxième Guerre mondiale dans des films sur la Résistance comme La Bataille du rail (1946) et Le Jour et l'heure (1962) mais jamais auparavant le conflit n’avait eu droit en France à une superproduction de cette ampleur. L’idée de Paul Graetz, son producteur, était de faire l’équivalent européen au Jour le plus long réalisé à plusieurs mains qui relate le débarquement. Pour interpréter les véritables héros de cette bataille homérique, René Clément fit appel aux plus grandes stars de l’époque : Alain Delon était Jacques Chaban-Delmas, Kirk Douglas le général Patton, Orson Welles le consul de Suède. Mais on y voit aussi Jean-Paul Belmondo en homme-clé de la Résistance, Simone Signoret en patronne de bistrot et Yves Montand en soldat tankiste. Presque toutes les scènes ont été tournées sur les lieux réels des événements avec près de 20 000 figurants. Il fallait démarrer le tournage dès le lever du jour et faire le moins de bruit possible pour ne pas effrayer les Parisiens. Les explosions furent doublées après le tournage. Paris brûle-t-il? connut un très grand succès grâce également à la chanson « Paris en colère » interprétée par Mireille Mathieu, dont la musique était signée Maurice Jarre.
La Résistance dans L'Armée des ombres (1969)
D’abord, il y a le roman de Joseph Kessel écrit en 1943 à Londres. Le résistant présente ainsi son livre : « Jamais la France n'a fait guerre plus haute et plus belle que celle des caves où s'impriment ses journaux libres, des terrains nocturnes et des criques secrètes où elle reçoit ses amis libres et d'où partent ses enfants libres, des cellules de torture où malgré les tenailles, les épingles rougies au feu et les os broyés, des Français meurent en hommes libres.» L’Armée des ombres est le troisième film consacré à l’Occupation de Jean-Pierre Melville, ancien résistant, après Le Silence de la mer (d’après le roman de Vercors) et Léon Morin, prêtre. Melville suit à la trace Philippe Gerbier (Lino Ventura), un ingénieur soupçonné d'activités dans la Résistance et arrêté par la police de Vichy. La sobriété de l’œuvre, accompagnée des jeux de lumière du directeur de la photographie Pierre Lhomme, et la musique envoûtante d’Éric Demarsan (devenue celle des Dossiers de l’écran), donne à l’œuvre un caractère intemporel. Interprété également par Simone Signoret, Paul Meurisse et Jean-Pierre Cassel, L’Armée des ombres est un film d’un réalisme froid qui continue d’inspirer beaucoup de réalisateurs.
La déportation dans Shoah (1985)
S’il y a un film qui a changé le regard du public sur cette période de l’Histoire, c’est Shoah, le documentaire magistral de Claude Lanzmann, sur l'extermination des Juifs par les nazis, fruit d’une enquête menée entre 1976 et 1981. Shoah expose pendant 9h30 les paroles brutes des survivants et bouleverse le travail de mémoire, au point que le mot "Shoah" vient remplacer celui d’Holocauste utilisé jusqu’alors. Afin d’aider les enseignants dans leur travail, et devant l’impossibilité de projeter l’œuvre dans son intégralité aux lycéens, Claude Lanzmann a ensuite édité une suite d’extraits particulièrement saisissants. L’interview du "coiffeur de Treblinka" est parmi ceux-là. Il y a aussi dans Shoah un geste purement cinématographique où l’utilisation du paysage ou de la photo d’archives vient accompagner le spectateur dans une expérience bouleversante et indispensable.
La collaboration dans Lacombe Lucien (1974)
Il en a fallu du temps pour que le cinéma cesse d’héroïser les Français. En 1971, Le Chagrin et la Pitié de Marcel Ophüls racontait un coin de France à l'heure allemande, à l’inverse des clichés habituels. La sortie du film fut très chahutée. Trois ans plus tard, Louis Malle et l’écrivain Patrick Modiano se mettent au défi de raconter la vie d’un jeune milicien, sa naïveté, son amoralité. L’histoire se situe en juin 1944, dans le Sud-Ouest de la France. Lucien, un jeune paysan de dix-sept ans, va partager la vie d'une bande d'auxiliaires français de la Gestapo après avoir été refoulé par les Résistants. Il va se mêler à eux et commettre des exactions. Puis, alors qu’il tombe amoureux de la fille d'un tailleur juif, le collabo se révèle plus retors encore. Est-on véritablement responsable de son destin ? Peut-on comprendre les collabos ? Louis Malle pose ces questions sans apporter de réponse et montre que les idéologies sont bien maigres chez certains. C’est la réussite de Lacombe Lucien aux élans romanesques servis par la musique de Django Reinhardt. Néanmoins, sa sortie dans une France très militante après 1968 ne fut pas du goût de tous. Une des raisons pour lesquelles il faut absolument revoir cette œuvre aujourd’hui, loin des polémiques.
L’occupation dans La Traversée de Paris (1956)
La Deuxième Guerre mondiale s’est aussi révélée un excellent sujet de comédie surtout quand il s’agit de railler les comportements des Français moyens, ni collabos ni résistants mais mesquins et débrouillards. Le marché noir est ici au centre du film de Claude Autant-Lara, adapté d’une nouvelle de Marcel Aymé par Jean Aurenche et Pierre Bost. Le héros, Marcel Martin, se retrouve obligé de transporter, d’un bout à l’autre de la capitale, quatre valises remplies d’un cochon en morceaux avec un obscur personnage nommé Grandgil. Si Bourvil reçut le prix d’interprétation au Festival de Venise pour son rôle de pleutre manipulateur, c’est la réplique de Jean Gabin faisant chanter Jambier l’épicier (Louis de Funès) pour augmenter ses honoraires qui est rentrée dans la liste des répliques cultes du cinéma français. Mais La Traversée de Paris reste amère et noire, à l’opposé d’un autre classique du genre, La Grande Vadrouille de Gérard Oury, sorti dix ans plus tard.