Après le documentaire Victor Hugo : les contemplations en 1966, Eric Rohmer replonge dans l’univers de l’écrivain trois ans plus tard pour Victor Hugo architecte. Dans ce court métrage pédagogique disponible gratuitement sur Gallica, la bibliothèque numérique de la Bibliothèque nationale de France, le cinéaste de la Nouvelle Vague évoque les nombreuses références à l’architecture présentes dans les écrits de Victor Hugo, et notamment dans Notre-Dame de Paris.
« ‘Dans le Notre-Dame de Victor Hugo, disait déjà Sainte-Beuve, l’idée première, vitale est l’architecture. Et les pages du roman les plus intéressantes pour nous, lecteurs du XXe siècle sont celles qui nous parlent de la cathédrale’ », raconte ainsi Antoine Vitez, voix de ce documentaire racontant la « grandeur » de cet édifice gothique. Si Eric Rohmer évoque la majestuosité de la cathédrale, il met avant tout en lumière certains éléments marquants de son architecture, notamment ces statues montrant « l’intrusion du grotesque dans l’art ». Alternant images de gargouilles ou chimères et caricatures réalisées par Victor Hugo, ce documentaire évoque aussi bien la vision qu’avait le romancier de Notre-Dame de Paris que certaines étapes de la construction de la cathédrale touchée le 15 avril par un violent incendie qui a détruit sa flèche, sa toiture, sa charpente en bois d’origine et une partie des voûtes.
Victor Hugo architecte fait partie de la courte liste de documentaires réalisés par Eric Rohmer. Après avoir mis en scène plusieurs courts métrages de fiction dans les années 1950 puis un premier long en 1959 (Le Signe du Lion sorti en 1962), le cinéaste a démarré au début des années 1960 ses Contes moraux. Le succès n’étant pas au rendez-vous, il s’est tourné vers des projets de commande lui permettant de gagner sa vie. Et pas que. « J’étais attiré par la télévision telle qu’elle pouvait être, et contre la télévision telle qu’elle était. J’ai toujours travaillé de manière indépendante et je faisais à l’époque des choses qui ne seraient plus possibles aujourd’hui. (…) [Mes films pour la télévision] étaient faits à partir de documents, conçus pour initier ceux qui les voyaient. Ils étaient montrés dans les lycées et les petites classes, alors qu’ils devaient plutôt à l’origine intéresser beaucoup plus les étudiants de l’enseignement supérieur », a notamment confié Eric Rohmer dans un entretien réalisé en 2004 pour la Cinémathèque française.