Comment êtes-vous arrivé sur la série de Danièle et Christopher Thompson ?
Je suis arrivé sur le tard en fait, et j’ai découvert un projet qui était très ambitieux. Les décors, le casting, l’atmosphère… Il y avait de vraies intentions. Pas mal d’autres décorateurs avaient refusé, j’ai donc fait des propositions à Danièle et Christopher Thompson dans l’idée d’optimiser le budget, en mutualisant notamment les décors et les lieux de tournage. Et c’est ainsi que j’ai été choisi. J’ai alors fait de nouveaux repérages, pour répondre aux attentes des créateurs, qui voulaient quelque chose de très réaliste. Parce que Danièle Thompson a bien connu cette période. C’est encore très présent dans son esprit et elle avait envie de retrouver dans la série ces images qu’elle avait en tête.
Quand on pense à Brigitte Bardot, on pense évidemment à la Madrague… Comment avez-vous recréé ce décor mythique de Saint-Tropez ?
On a trouvé un hangar à bateaux, perdu au milieu des bois. Un endroit incroyable, dans le Var, près de Brégançon. Je ne pensais pas que ça existait encore ! On a eu la chance de tomber sur ce lieu absolument unique, que ses propriétaires ont accepté de louer pour le tournage. Il faut rappeler que la Madrague était aussi à l’origine un hangar à bateaux, avec une petite maison de pêcheurs au-dessus. Après, il a fallu aménager le décor pour essayer de correspondre à une forme de réalité et recréer un univers, en l’occurrence ce monde que Brigitte Bardot a découvert en arrivant à Saint-Tropez à l’époque, alors que ce n’était encore qu’un village de pêcheurs désert…
Comment vous êtes-vous documenté en amont afin de rester fidèle à la réalité de l’époque ?
Brigitte Bardot a été l’une des stars les plus photographiées de son temps. Partout, tout le temps : chez elle, dehors, dans sa voiture, dans sa cuisine… Il existe une iconographie énorme, qu’il a d’abord fallu compiler, en lien avec le scénario. On a regroupé des milliers de clichés d’elle, dans des lieux parfois insolites, à des moments de sa vie privée. On a fait une synthèse de tous ces documents et on a cherché à en tirer l’essence pour retranscrire à l’écran ce qui nous paraissait important. Par exemple, son lit : elle avait un lit très particulier, celui dans lequel elle a accouché à Paris et qu’il nous paraissait essentiel de retrouver. Sa coiffeuse, également, nous semblait être un élément emblématique à recréer. On a ainsi essayé de reconstituer des éléments qui retranscrivaient l’époque d’une manière propre à Brigitte Bardot. On a fait fabriquer pas mal de meubles, pour coller au plus près de sa personnalité, c’est-à-dire une forme de modernité : Brigitte Bardot sortait d’un milieu très bourgeois, très conventionnel, mais elle a fini par se créer un univers à elle, très moderne, qui témoignait de sa personnalité.
La série raconte aussi les films de Brigitte Bardot. Comment avez-vous pensé la reconstitution des plateaux de tournage de l’époque ?
C’était la cerise sur le gâteau pour moi, parce que j’ai connu, à mes débuts, les plateaux de Joinville ou de Boulogne. Ces studios où l’on trouvait encore des passerelles en bois… C’était incroyable de pouvoir les reconstituer. Après, ce n’est pas si compliqué, parce que tout se faisait avec des matériaux simples, donc on a pu fabriquer facilement des éléments. Et puis on a loué tout un tas de matériel de cinéma de l’époque, des caméras et autres, en passant notamment par les frères Loubeau, qui sont de grands collectionneurs. Ensuite, il a fallu reconstituer des décors à partir des images des films. Certains étaient en noir et blanc, il a donc fallu imaginer la couleur. Au final, recréer un plateau de cinéma sur un plateau de tournage m’a beaucoup inspiré.
Il y avait aussi l’ambiance des années 50 à recréer. D’où avez-vous tiré vos inspirations ?
Là aussi, on s’est appuyé sur les documents existants. Il existe de nombreuses images de cette époque dans lesquelles puiser. Des choses qui n’ont rien à voir avec Brigitte Bardot, mais qui permettent de retranscrire l’ambiance générale des Trente Glorieuses, avec tout le modernisme qui arrivait alors dans la société française : le frigidaire américain, les cuisinières à gaz, etc.
On imagine aussi que ce genre de reconstitution demande une étroite collaboration avec le département des costumes ?
Oui, c’est essentiel. On a travaillé en collaboration constante avec la costumière Marylin Fitoussi, que je connaissais déjà, puisque nous avons fait ensemble le film Kaamelott. C’est un processus assez rodé. On se fait une lecture des scripts. On discute des couleurs, des intentions. Si elle me dit qu’ils ont choisi telle couleur pour les costumes dans telle scène, j’essaye d’harmoniser la couleur des décors ou au contraire, de faire ressortir un contraste. Il y a une forme d’harmonie entre les deux départements.
Y a-t-il une pression particulière à travailler sur un mythe français comme Brigitte Bardot ?
Non pas spécialement. On ne se pose pas trop la question, je crois… De toute façon, quand on refait la Madrague, le but, ce n’est pas de copier la Madrague. C’est de créer un univers, une ambiance crédible qui ressemble à Brigitte Bardot.
Bardot, en 6 épisodes, à voir sur France 2 à partir du 8 mai 2023
Créée, écrite et réalisée par Danièle Thompson et Christopher Thompson
Avec Julia de Nunez, Hippolyte Girardot, Géraldine Pailhas, Yvan Attal…
Produite par Federation Entertainment et G-Films
Soutien du CNC : aide à la production (automatique)