Claude Brasseur, le cinéma français en deuil

Claude Brasseur, le cinéma français en deuil

23 décembre 2020
Cinéma
Claude Brasseur
Claude Brasseur Gaumont International- Les Productions de la Guéville
Le héros de Vidocq, Un éléphant ça trompe énormément, La Boum et Camping, doublement césarisé, s’est éteint à 84 ans le 22 décembre.

« J’essaie toujours d’évoluer dans des rôles et des registres les plus différents possibles. Je ne vois pas ce qu’il y a de commun entre l’homosexuel d’Un éléphant ça trompe énormément, le flic de La Guerre des polices ou le comédien raté de Josepha. Et c’est la raison profonde pour laquelle je fais ce métier ». Ainsi parlait Claude Brasseur dans Mon Zénith à moi sur Canal + au cœur des années 80. Une ligne de conduite, présente dès le début de son impressionnant parcours (plus de 90 films, une cinquantaine de pièces, des feuilletons, des téléfilms…), et jamais démentie jusqu’à son dernier rôle - celui du père de Franck Dubosc dans Tout le monde debout, en 2018.

Brasseur, c’est d’abord une lignée de comédiens. Claude est le fils de Pierre Brasseur et Odette Joyeux et le père d’Alexandre. Chez cet artiste le mot « jouer » était indéfectiblement lié au plaisir. Et à cette idée aussi qu’il s’agissait d’un métier qui ne se pratique qu’en bande, en troupe. « Je suis un artisan qui appartient à un collectif » se définissait ainsi celui qui aimait si peu parler de lui, jugeant à tort que ses confessions ne seraient que d’un intérêt limité.

Claude Brasseur (de son vrai nom Espinasse) grandit au milieu des prestigieux amis de ses parents, dont son parrain Ernest Hemingway. Il doit le basculement de son destin (au milieu des années 50) à Elvire Popesco. Alors journaliste pour Paris Match, il va l’interviewer mais lui cache son désir de devenir acteur. C’est la comédienne qui lui assure qu’avec un nom pareil, il ne peut pas ne pas embrasser ce métier. Elle joint le geste à la parole en l’engageant pour débuter dans Judas de Marcel Pagnol au Théâtre de Paris. Sa carrière sur les planches est lancée. Il y jouera Molière, Racine, Dumas, Planchon, y créera Le Souper de Brisville et Le Dîner de cons de Veber avant d’être acclamé voilà encore cinq ans pour sa composition en Clémenceau dans La Colère du Tigre.

Mais très vite, la télévision et le cinéma vont l’accaparer. Sur le petit écran, il campe en 1971 un inoubliable Vidocq. Et sur le grand, ses premiers pas se font sous l’égide de Marcel Carné (Ce pays d’où je viens), Georges Franju (Les Yeux sans visage), Jean Renoir (Le Caporal épinglé), Jean- Luc Godard (Bande à part) ou encore François Truffaut (Une belle fille comme moi). Tout s’accélère au cœur des années 70. D’abord grâce à Georges Lautner qui lui offre le rôle masculin principal des Seins de glace face à Mireille Darc et évidemment  le diptyque d’Yves Robert, Un éléphant, ça trompe énormément et Nous irons tous au Paradis, qui lui vaut un César du second rôle. On le voit ensuite chez Claude Sautet dans Une histoire simple avant qu’il ne décroche son second César, celui du meilleur acteur cette fois-ci, pour La Guerre des polices réalisé par Robin Davis.

Les années 80 vont, dans la foulée, assoir une popularité qui ne s’est, depuis, jamais démentie. Le vainqueur du Paris-Dakar automobile avec Jacky Ickx sera l’inoubliable père de Vic de La Boum (de Claude Pinoteau) et le célèbre Jacky Pic de Camping (de Fabien Onteniente). Entre temps, il y aura eu Claude Zidi, Philippe De Broca, Catherine Breillat, Bertrand Blier, Danièle Thompson, Dominique Cabrera, Claude Berri, Jean- Jacques Annaud, Jean Paul Rouve ou Thierry Klifa. Des comédies, des drames. Des rires, des larmes. Une histoire du cinéma français à lui tout seul.