Découvrez "Vieillir à l’ombre", de Johanna Bedeau

Découvrez "Vieillir à l’ombre", de Johanna Bedeau

23 juillet 2020
Cinéma
Vieillir à l'ombre de Johanna Bedeau - Ysé Productions
"Vieillir à l'ombre" de Johanna Bedeau Ysé Productions
Avec ce moyen métrage consacré aux personnes âgées incarcérées en France, Johanna Bedeau s’affirmait comme une documentariste passionnée par les maux de notre société. Portrait de cette anthropologue de formation devenue cinéaste engagée.

Après avoir travaillé pendant une décennie sur la vie carcérale en Afrique et en France, Johanna Bedeau signe en 2014 un moyen métrage saisissant, un film documentaire qui casse un tabou sur l'incarcération des condamnés du troisième âge. Récompensé par une Étoile de la Scam, Vieillir à l'ombre s'intéresse à ces prisonniers purgeant de longues peines, ces vieux détenus se retrouvant sans horizon possible. A travers ce reportage dans les couloirs du centre pénitentiaire de Liancourt dans l'Oise, on écoute les confessions étonnantes de Jean-Luc, 72 ans, de Daniel, 68 ans, ou encore de Robert, leur geôlier. « Comment justifier la prison pour des personnes âgées ? Que faisons-nous face à la vieillesse en prison ? », se demande Johanna Bedeau dans ce documentaire. Elle explique être allée travailler très tôt en prison pour tenter de comprendre. « Au cours de mes nombreux travaux, j’ai décelé une profonde détresse chez les vieux détenus. J'ai vu les détenus longues peines vieillir en prison ; l'abandon progressif des familles fait naître un désespoir terrible, et il n’y a pas de réelle réinsertion possible, encore moins pour les vieillards... »

Pour mettre sur pied ce film coup de poing, la réalisatrice a adopté une approche progressive en enregistrant dans un premier temps à Liancourt des documentaires pour la radio. Un média que Johanna Bedeau connaît bien puisqu'elle collabore avec France Culture depuis de longues années, signant des reportages radiophoniques centrés sur des personnalités engagées comme l’actrice et metteuse en scène Emmanuelle Laborit ou l'expert psychiatre Daniel Zagury, ou bien sur des thématiques sociales comme l'éducation, le droit à l'avortement ou l'écologie.

Des courts métrages contre les violences faites aux femmes

Anthropologue de formation, la documentariste a également beaucoup travaillé sur la condition féminine en Afrique et en France. En 2006, elle co-signe Bilakoro, un film sur l'excision au Mali à travers la vie quotidienne de trois femmes. Quelques années plus tard, elle réalise en France le film Ma Cité au féminin, qui nous emmène dans une cité à la périphérie de Paris et nous montre le parcours de trois jeunes femmes, qui ne se ressemblent pas, ne sont pas de la même génération, mais « ont en commun l'obéissance aux codes non écrits qui gouvernent la vie des filles des banlieues ». Entre temps, Johanna Bedeau s'engage dans des missions de sensibilisation pour la protection des femmes. Elle dirige deux courts métrages pour le Ministère du Droit des Femmes. Le premier, Anna (en 2013) alerte sur la détection des violences conjugales. L'année suivante, elle prolonge son travail avec Elisa, un autre court, qui s'intéresse aux symptômes post traumatiques, souvent réactivés par une grossesse.
Aujourd'hui, Johanna Bedeau poursuit son travail de sensibilisation des citoyens à travers ses reportages pour France Culture et des documentaires comme Détenus, victimes : une rencontre, un autre film sur le monde carcéral, diffusé en 2019 dans le cadre de l'émission Infrarouge sur France 2, et qui tentait une expérience inédite : organiser des rencontres « détenus-victimes », pour tenter de guérir des souffrances communes.