Ouvert en septembre 1999, l’Utopia Saint-Siméon, qui fête ses 20 ans, est le seul cinéma art et essai du centre-ville de Bordeaux. Il bénéficie des trois labels de distribution art et essai (Jeune Public, Recherche et Découverte, Patrimoine et Répertoire) et fait partie du réseau Europa Cinémas (soutien à la distribution à l’échelle européenne).
C’est dans les murs d’un ancien édifice religieux, l’église Saint-Siméon (XIVe siècle), que le cinéma Utopia de Bordeaux a vu le jour. Un écrin atypique pour ses cinq salles, pouvant accueillir 555 spectateurs. Si le lieu est unique, il est raccord avec le style des autres salles du réseau Utopia. « Dans toutes les salles Utopia, il y a des tableaux, des statues, de la décoration autour de l’écran, très art nouveau… ça fait vieux théâtre, c’est une atmosphère chaleureuse. C’est ça, l’identité du lieu. Ce n’est pas froidement gris ou impersonnel, » souligne Stephen Bonato, l’un des responsables des lieux.
Inauguré le 20 septembre 1999, avant d’être ouvert au public neuf jours plus tard, l’Utopia de Bordeaux peut compter sur deux parrains prestigieux : Jean-Pierre et Luc Dardenne. La première projection au public, c’était leur film Rosetta, qui leur a valu leur première Palme d’or. Les cinéastes belges étaient venus à cette occasion à l’Utopia de Bordeaux présenter leur film. « Ce sont des amis depuis longtemps, des amis que l’on ne voit pas fréquemment, mais une amitié à laquelle nous sommes très sensibles », déclarait alors Jean-Pierre Dardenne dans les colonnes du quotidien Sud-Ouest.
Un fonctionnement coopératif
L’autre particularité de l’Utopia de Bordeaux vient de son mode de gestion. « La salle Utopia est une SCOP, une société coopérative : dix des douze salariés ont des parts dans l’entreprise, et chacun est décisionnaire. Les décisions sont mises au vote, chacun possède une voix », explique Stephen Bonato. Et chacun maîtrise tous les postes clés du cinéma : caisse, projection, accueil... Autre choix important : il n’y a pas de confiserie, alors qu’il s’agit d’une source de revenus non négligeable pour une salle de cinéma. En fait, « le seul revenu vient du ticket de cinéma », insiste Stephen Bonato. Quant au café du cinéma, il est loué à des sous-traitants, à un tarif volontairement bas.
Cet esprit coopératif et d’échange fait partie intégrante de la philosophie de l’Utopia de Bordeaux. « Notre métier, c’est partager des films, des goûts. On conseille les habitués, c’est formidable, cela donne du sens à ce que l’on fait », s’enthousiasme Stephen Bonato. La salle sert aussi de lieu de rencontre et d’événements pour différentes associations. Une dernière preuve de la fidélité réciproque entre la salle et son public : l’existence d’une association de spectateurs, Les Amis d’Utopia, qui remettent chaque année un prix à leur film préféré : en 2018, c’est L’Amour flou de Romane Bohringer et Philippe Rebbot qui avait été récompensé.
Le dialogue entre spectateurs et responsables de la salle passe également par une revue : La Gazette, mise en page comme un journal de la Belle époque (avec gravures en noir et blanc), qui permet de se tenir au courant des sorties et événements des salles. Disponible en papier partout sur Bordeaux (et en téléchargement sur le site), « c’est un élément très, très important de l’identité des cinémas Utopia », explique Stephen. Dans le même esprit coopératif, la gazette est financée intégralement par les publicités insérées dans ses pages. Les informations sont communes à toutes les salles du réseau Utopia, à l’exception de la salle de Saint-Ouen-L’Aumône, trop éloignée géographiquement. « De plus, les salariés écrivent presque tous les textes de la gazette, selon leur envie de parler des films », précise Stephen Bonato.
Enfin, si l’Utopia de Bordeaux occupe une place particulière dans le réseau, c’est que c’est ici que l’impulsion est donnée et que les films à programmer sont suggérés à trois autres salles Utopia (Avignon, Toulouse, Montpellier). Chaque salle conserve sa liberté et a le pouvoir de programmer les films de son choix.