Qu’est-ce que La Toile VOD ?

Qu’est-ce que La Toile VOD ?

05 juin 2019
Cinéma
Jusqu'à la garde de Xavier Legrand
Jusqu'à la garde de Xavier Legrand KG Productions - DR
Née en 2017, cette plateforme n’est autre que le service VOD des salles de cinéma indépendantes. Explications avec Joséphine Létang, sa fondatrice.

Garder un lien privilégié avec les spectateurs, jusque dans leur salon. C’est, en résumé, le principe de La Toile, plateforme VOD mettant à disposition du public une sélection de films effectuée « en collaboration avec leur cinéma de proximité ». Plus d’une soixantaine d’établissements prolongent ainsi, en dehors de leurs murs, leur travail de cinématographie auprès du public. Chaque cinéma a sa page personnalisée proposant six films à la une et des thématiques en lien avec sa programmation, sa ligne éditoriale et les différents événements qui rythment son quotidien (avant-premières, rencontres avec des réalisateurs, etc). « Nous proposons aux cinémas et au public d’avoir un accompagnement en VOD. Lorsqu’un long métrage sort, le spectateur n’a pas forcément vu le film précédent du même réalisateur, son court métrage ou d’autres réalisations en lien. Avant ou après votre séance, vous pouvez les découvrir sur La Toile. Chaque semaine, les films changent afin d’accompagner les sorties nationales. Pour les cinémas à la programmation mensuelle comme le Gyptis de Marseille, l’offre évolue chaque mois. Nous travaillons avec eux pour trouver des propositions de films correspondant à leur ligne éditoriale », précise Joséphine Létang, la créatrice de ce service qui permet par exemple de visionner Jusqu’à la garde de Xavier Legrand, Le Poirier sauvage de Nuri Bilge Ceylan ou encore Un couteau dans le cœur de Yann Gonzalez.

Contrairement aux grands sites de VOD rassemblant des milliers de références, La Toile mise pour sa part sur un catalogue plus restreint d’un peu plus de 300 films à ce jour. « On améliore l’offre en proposant des nouveautés et on travaille pour enrichir le catalogue, notamment des films de patrimoine pour la culture cinéma. Nous voulons une offre restreinte pour offrir un vrai accompagnement : il ne s’agit pas ici d’un algorithme vous proposant des films, mais un choix fait par des personnes qui ont de vraies connaissances ». Pour construire la programmation, l’équipe de La Toile travaille en étroite collaboration avec les cinémas partenaires. « Nous avons construit un système clé en main car nous ne voulions pas prendre du temps supplémentaire aux cinémas qui sont déjà très occupés. Nous gérons la plateforme, présélectionnons les films, imaginons des sélections thématiques et nous occupons des droits VOD. Nous présélectionnons des titres chaque semaine dans les catalogues de plus de dix-sept ayants droit. Nous sommes heureuses d’avoir le soutien de beaucoup de distributeurs et d’avoir accès à des catalogues de qualité. Si un cinéma organise un événement spécifique ou souhaite une œuvre en particulier, il peut également nous en faire la demande et nous échangeons avec eux pour trouver ce qui leur correspond », explique Joséphine Létang.

Un service « pensé pour les exploitants »

« C’est un complément et non un remplacement du travail de la salle, souligne-t-elle. Il leur permet également d’avoir une petite source de revenus et surtout de fidéliser le spectateur. Au lieu de regarder sur une autre plateforme, le public reste le client de la salle, même chez lui. La relation humaine entre le spectateur et le cinéma se poursuit, ce qui créé un lien encore plus fort entre eux. 68,7% des personnes inscrites sur La Toile ne sont pas clientes d’un autre service VOD ou sVOD. C’est la plus grande réussite de ce projet qui prouve que le rôle de prescripteur des cinémas se maintient jusqu’à la VOD. Avec La Toile, nous fidélisons les spectateurs de la salle même lorsqu’ils n’ont pas forcément l’habitude de la Vidéo à la Demande ».

Ce service a rapidement intéressé les exploitants. « J’ai testé l’idée auprès de certains d’entre eux, notamment auprès de groupements d’exploitants. En l’espace de quelques appels, j’ai senti un grand enthousiasme ce qui montre que les salles étaient prêtes à faire un pas. Nous avons ouvert les premières plateformes en septembre 2017 avec cinq salles indépendantes et innovantes : Le Lux à Caen, Le Star à Strasbourg, Le Méliès à Saint-Etienne, le Gyptis à Marseille, Le Cinéma des Cinéastes à Paris», raconte cette ancienne exploitante. « Notre modèle respecte la chronologie des médias et le métier de l’exploitation. » Une démarche qui a rassuré certaines salles affichant quelques réticences à proposer de la VOD.

L’idée de La Toile a germé dans l’esprit de Joséphine Létang lorsqu’elle était encore directrice d’un six salles à Arcueil. « A l’époque, les cinémas n’avaient pas de page sur les réseaux sociaux, pas de newsletters, peu de moyens de communiquer avec le public en dehors de l’établissement. Une grande chaîne de supermarchés venait de lancer sa plateforme VOD et je me suis dit que ce n’était pas à elle de conseiller les gens dans ce domaine. Il me paraissait logique que les salles aient leur propre plateforme et gardent leur relation de proximité avec le public. Il est également important que les cinémas se regroupent pour avoir une offre commune tout en gardant chacun ses spécificités ».

Quelle rémunération pour les exploitants ?

Les films sélectionnés par La Toile sont proposés en moyenne à 3,99€ en location pendant 48h. Le site ne propose pas d’abonnement « du fait de la chronologie des médias : proposer un abonnement nous aurait empêchées de proposer des films de nouveautés ». Et « c’est finalement la même démarche qu’aller au cinéma : on paie pour chaque séance ». La plateforme propose également un Pass Films qui permet de pré-acheter des locations : « Nous avons voulu reproduire le modèle de la carte d’abonnement des cinémas, pour être toujours plus fidèle aux habitudes des spectateurs ».

Parce qu’il est pensé pour et en étroite collaboration avec le cinéma, les établissements partenaires touchent une partie des recettes de la plateforme. Dans les mois à venir, La Toile souhaite continuer à fédérer les exploitants. L’objectif pour Joséphine Létang est de « proposer une réelle alternative VOD de qualité et de proximité aux spectateurs des salles de cinéma ». « L’important à nos yeux est de mettre en avant le travail des cinémas et de leurs équipes afin de créer une synergie positive pour faire face à la démocratisation de la VOD. »

La Toile est soutenue par Europe Creative et le CNC.