BAARA de Souleymane Cissé (Mali) - 1979
Baara (Le Travail) est le deuxième long métrage de fiction du cinéaste malien né en 1940, Souleymane Cissé. Son triomphe au FESPACO où le film reçoit l’Etalon de Yennenga en 1979, impose le réalisateur malien non seulement en Afrique mais aussi en Occident où il faudra toutefois attendre 1987 et son film Yeelen - couronné d’un Prix spécial du Jury au Festival de Cannes - pour une consécration pleine et entière. Entre-temps, Cissé aura doublé la mise au FESPACO avec Finye en 1983. Le cinéaste préoccupé par les questions sociales de son pays donne à chacun de ses films une forte teneur politique. Baara raconte ainsi le parcours d’un jeune ingénieur fraîchement embauché dans une usine de Bamako où le droit des ouvriers est bafoué. Le héros va organiser une réunion afin que tout le monde puisse s’exprimer. Une initiative qu’il paiera de sa vie. Le film parle de la corruption qui gangrène alors le Mali et dresse en creux le portrait d’une société rongée de l’intérieur.
TILAÏ d’Idrissa Ouédraogo (Burkina Faso) – 1991
Repéré au FESPACO dès son premier court métrage, Poko en 1981, qui obtient la plus grande récompense dans sa catégorie, le cinéaste burkinabé né en 1954 est une figure du cinéma national. Son parcours qui passe par Moscou et Paris où il étudie le cinéma à l’IDHEC, le ramène dans son pays où il situe la quasi-intégralité de ses films. Son deuxième long métrage Yaaba, obtient en 1989 un Prix de la critique au festival de Cannes et un Prix du public au FESPACO. Il récidive avec Tilaï (La Loi) l’année suivante couronné d’un Prix du Jury sur la croisette et de l’Etalon de Yennenga en 1991. L’action de Tilaï se situe dans un petit village burkinabé où un jeune homme revient après des mois d’absence. A son retour, il trouve sa promise dans les bras de son père qui a pris la jeune femme pour seconde épouse. A travers ce drame Ouédraogo remet en cause les vieilles traditions du pays. De l’aveu même de son auteur décédé en 2018 à l’âge de 64 ans, le scénario est une transposition d’une tragédie grecque dans l’Afrique contemporaine. En 2003, Idrissa Ouédraogo sera président du FESPACO qui récompensera En attendant le bonheur d’Abderrahmane Sissako.
EN ATTENDANT LE BONHEUR d’Abderrahmane Sissako (Mauritanie) - 2002
La reconnaissance du cinéaste mauritanien passera d’abord par la France puisque son moyen métrage Octobre tourné à Moscou? où Abderrahmane Sissako a étudié le cinéma, reçoit le Prix Un Certain Regard du festival de Cannes en 1993. Le FESPACO le célèbre avec une mention spéciale du jury pour La Vie sur Terre en 1999 avant d’obtenir la récompense suprême pour ce En attendant le bonheur. Le scénario de ce film choral s’inspire du retour du cinéaste dans son pays natal en 1980. Les parents de Sissako ont, en effet, émigré au Mali peu après sa naissance aux débuts des années 60. L’action d’En attendant le bonheur se déroule à Nouadhibou, une petite ville de pêcheurs sur les côtes de la Mauritanie. Différents personnages s’apprêtent à faire des choix qui vont conditionner leur existence. L’un prépare son départ vers l’Europe, une autre, meurtrie par la mort de sa fille essaie de refaire surface… Ce film d’une grande douceur préfigure les deux chefs d’œuvres à venir : Bamako et Timbuktu.
ALI ZAOUA, PRINCE DE LA RUE de Nabil Ayouch (Maroc) – 2001
Ce film très émouvant autour du destin d’un jeune Marocain est le deuxième long métrage du franco-marocain Nabil Ayouch né en 1969. Le cinéaste dont le premier film Mektoub en 1997 avait totalisé des records d’entrées au Maroc, est devenu l’une des figures majeures du cinéma dans son pays. Très impliqué dans la production, le cinéaste a créé une structure – la Film Industry Made in Morocco – véritable vivier des jeunes auteurs du pays. Ses films plus récents comme Les Chevaux de Dieu (2012) ou Much Loved (2015) ont été remarqués au festival de Cannes. Le dernier qui raconte le sort de prostituées marocaines a créé une polémique au Maroc où il a été interdit de projection. Ali Zaoua, prince de la rue se déroule dans les rues de Casablanca, où l’on suit une bande de gamins livrés à eux-mêmes. L’un d’entre eux, Ali Zaoua a un rêve : devenir marin et faire le tour du monde. Lors d’une rixe avec une bande rivale, Ali est tué. Ses amis vont tout faire pour qu’il soit enterré dignement. Ce film assume sa part sentimentale et brille par l’énergie solaire de son interprétation. Le film triomphe au FESPACO en 2001.
FELICITE d’Alain Gomis (Sénégal) – 2017
A l’instar de Souleymane Cissé, Alain Gomis a déjà obtenu deux Etalons de Yennenga. Le premier en 2013 pour Aujourd’hui, film situé dans les rues de Dakar porté par le chanteur américain Saul Williams et ce Félicité en 2017, également couronné du Grand Prix du Jury à Berlin. Ce film qui suit le parcours d’une mère - la Félicité du titre - pour sauver son fils accidenté, envisage la ville de Kinshasa comme un labyrinthe mental étouffant. Le film se substitue tout entier à son héroïne. Sa peau, sa grâce, son mutisme, son combat, ses errances et ses rêves, deviennent ainsi le vecteur de toutes les émotions. Sa voix aussi puisque Félicité est une chanteuse à la voix d’or. La mise en scène sensuelle et musicale d’Alain Gomis rend sensibles les moindres vibrations.