En quoi consiste Fly, l’expérience immersive qui vous a valu le Virtuality Award, dans le domaine marketing, décerné lors du 3e salon de la réalité virtuelle au Centquatre-Paris ?
C’est une ancienne correspondante de la BBC qui est venue nous chercher pour réfléchir sur une expérience autour de l’aviation. Le projet était financé par British Airways qui fêtait ses 100 ans mais nous laissait une grande liberté créative. On a développé un récit interactif et multisensoriel retraçant l’histoire et l’avenir du vol : des premières idées de Leonard de Vinci enfant avec son ornithoptère au premier vol réussi des frères Wright pour finir par un prototype de ce que pourrait être l’aviation au 22e siècle.
Novelab est connu pour ses fictions et ses documentaires immersifs (Notes on Blindness, Spheres). Cette expérience marketing marque-t-elle un tournant pour votre studio?
Non, c’est vraiment une branche complémentaire. Novelab travaille en permanence à la frontière de ce qui se fait et de ce qui n’est pas encore fait. Pour aller de l’avant, nous avons fait le choix d’avoir des équipes permanentes afin de favoriser une bonne synergie et de développer des savoir-faire très pointus qui ne se retrouvent pas ailleurs. La contrainte, c’est de pouvoir équilibrer nos budgets. Les projets narratifs immersifs sont par nature aléatoires car ils relèvent de l’expérimentation. Mettre en chantier des productions à la demande des industriels a le double avantage de nous apporter des financements complémentaires tout en pouvant explorer en recherche et développement de nouveaux outils. Ça nous permet de maintenir un haut niveau de technicité et de qualité pour continuer de faire des productions audiovisuelles narratives sur lesquelles on peut tester des choses complètement folles.
Comment pourriez-vous qualifier votre savoir-faire ?
Le spectre est très large. Notre savoir-faire, c’est la création d’expériences immersives et interactives. Il y a la VR (réalité virtuelle ndlr) et l’AR (réalité augmentée ndlr), bien sûr, et c’est ce qui génère le plus de visibilité, mais nous travaillons aussi dans les nouveaux médias. On a fait du web interactif en format Instagram. On vient de sortir avec Audible une série audio, Malfosse, en son spatialisé binaural (qui cherche à reproduire la perception du son naturelle d’une personne ndlr). On a lancé une application AR pour le film Minuscule. On a conçu un outil d’entraînement VR pour les conducteurs SNCF de TER… Novelab, c’est une exigence de qualité et une construction d’expériences qui ont du sens. Pour chaque projet, on se demande pourquoi on envisage cette interaction et ce qu’elle apporte vraiment. Lorsqu’on exploite la VR, il faut le faire pour ce qu’elle a d’unique. Parfois, la VR n’est peut-être pas adaptée au projet de départ. Notre vocation, c’est de pouvoir guider les gens par rapport à une intention originale.
Quel bilan tirez-vous de ces dix ans ?
On est très contents d’accompagner l’éclosion de ce nouveau format. On est toujours poussés par l’enthousiasme d’avoir explosé les limites. Notes on Blindness était précurseur d’un travail sur le son. Spheres était assez novateur au niveau du design d’interaction. Il y a encore plein de choses à explorer dans le domaine du son, des avatars, de la mobilité. A Rouen, dans le donjon, nous venons de créer un hyper escape game très mobile qui nous projette au temps de Jeanne d’Arc et mêle la réalité et le virtuel.
Comment voyez-vous l’avenir de la VR ?
Je pense qu’on va aller de plus en plus vers des expériences réellement immersives. La VR devrait être de plus en plus présente dans le monde du jeu et dans les expériences narratives interactives. Nous préparons pour janvier un film narratif en six degrés de liberté sur la grotte Chauvet. La VR mobile, sans câbles ou appareils supplémentaires, va être de plus en plus facile à mettre en œuvre. La réalité augmentée est aussi un secteur qui a beaucoup de possibilités à offrir. L’idée est de donner une meilleure conscience de ce qu’on est en train de voir ou de vivre.