CNC : Comment est né le projet Handigamer ?
David Combarieu : C’est un projet que j’ai lancé avec mon beau-fils, Théo Jordan, il y a un peu plus d’un an, suite à une première manette que j’ai faite pour lui. Il est en situation de handicap et ne pouvait plus du tout utiliser sa console. J’ai modifié sa manette avec des boutons plus gros qu’il pouvait atteindre. Comme ça fonctionnait bien, on a décidé de pousser l’idée plus loin et de proposer ça à d’autres joueurs. On a déjà livré une vingtaine de manettes en France. Il y a un gros besoin car les industriels, et fournisseurs de jeux vidéo, ne peuvent pas faire du sur-mesure. Ils ne sont pas dimensionnés pour ça.
Microsoft a annoncé, en mai dernier, l’arrivée de sa première manette adaptée au handicap. C’est un signe que les choses commencent à changer ?
Xbox fait des efforts avec la nouvelle manette, clairement destinée à un public handicapé. Mais ça reste une plateforme où il faut inventer les accessoires qui vont autour. Ce produit va malgré tout apporter une solution pour de nombreuses personnes. La nouveauté, c’est que la console de salon devient ouverte au matériel d’autres fournisseurs. Ils ont accepté par exemple qu’on branche ds accessoires d’autres marques sur leur console.
C’est difficile de faire quelque chose de standard alors que tous les handicaps sont différents ?
L’origine du handicap fait que bien souvent, ce n’est pas la même configuration. Si c’est une maladie qui va évoluer dans le temps ou s’il s’agit d’un accident où on peut avoir une certaine récupération, la personne n’est pas du tout dans la même situation et ne va pas chercher la même chose. Quand on parle de tétraplégie, il y a tous les stades : partiel, complet… La motricité des mains va être très variable d’un joueur à l’autre. Certains voudront des boutons très sensibles parce qu’ils ont perdu en muscles. D’autres, des très gros car il y a un problème de précision dans les gestes.
Le sur-mesure est donc nécessaire ?
Pour l’instant, tous nos produits sont quasiment unitaires. Mais nous travaillons sur des solutions pour essayer d’industrialiser un peu les choses avec des boîtiers modulables où on pourra choisir des options, comme la taille des boutons et la position du joystick. L’objectif, c’est d’avoir un objet qui reste configurable mais moins cher, plus fiable et plus rapide à produire. C’est vers ce genre de produits que s’oriente aujourd’hui le projet Handigamer. Nous espérons pouvoir les montrer à la fin de l’année. Nous sommes allés sur le terrain visiter des centres de rééducation avec des patients qui sont en attente de solutions. Nous travaillons avec les médecins, les ergothérapeutes…
Vous avez des contacts avec des grands groupes pour développer votre projet ?
Pour l’instant, nous sommes soutenus amicalement par Xbox France. Mais nous n’avons pas d’autres contacts avec des constructeurs. Ça viendra peut-être car nous travaillons sur toutes les consoles du marché.
Une manette personnalisée, ça représente un budget important ?
Une modification de manette, pour jouer d’une seule main, coûte entre 250 et 300 euros. Sur une manette plus compliquée, avec un boitier sur mesure et des boutons de contrôle, ça monte à 450 euros et deux jours de travail. C’est un budget. C’est pour ça que nous travaillons sur des solutions plus industrielles. Je m’investis totalement dans ce projet car j’aimerais ne faire que ça : créer de beaux produits. Et si je pouvais créer des emplois, je serais vraiment content.
Qu’est-ce que cette manette a changé pour Théo, votre beau-fils ?
C’est le plaisir aussi de jouer en ligne, avec des amis, de se confronter à d’autres joueurs, de gagner, de faire de la compétition... Aujourd’hui, nous travaillons ensemble. Il a fait des études de communication donc il s’occupe plus de ce domaine, et moi de la conception.