Le Cnam-Enjmin, l’école publique dédiée au jeu vidéo

Le Cnam-Enjmin, l’école publique dédiée au jeu vidéo

18 octobre 2024
Jeu vidéo
Cnam-Enjmin
Le Cnam-Enjmin, un campus situé à Angoulême Julia Hasse

Le Cnam-Enjmin, École nationale du jeu et des médias interactifs située à Angoulême, accueille chaque année 300 étudiants. Sélectionnée dans le cadre du plan France 2030 « La Grande fabrique de l’Image », cette école forme aux métiers du jeu vidéo depuis 2001. Retour sur son histoire avec Catherine Rolland, responsable des projets pédagogiques.


Comment est né le Cnam-Enjmin ?

Catherine Rolland : Le Cnam-Enjmin est à ce jour la seule école publique entièrement dédiée au jeu vidéo. Elle existe depuis 2001, avec la création d’un DESS [diplôme d'études supérieures spécialisées, ndlr] jeu vidéo et médias interactifs. Trois ans plus tard, un master a été créé, avec la même conviction : former simultanément tous les corps de métiers du jeu vidéo. Nous formons ainsi aux six spécialités les plus actives lors de la production d’un jeu : le game design, le sound design, le management de projet, la programmation, les game artists et les ergonomes, aussi appelés les UX designers, qui font de la recherche autour de l’expérience utilisateur. Notre objectif est qu’en sortant de l’école, chaque diplômé soit capable d’intégrer une équipe de production en connaissant les enjeux des autres spécialités, tout en étant opérationnel dans son expertise métier.

Quel est le processus d’admission au Cnam-Enjmin ?

Il faut avoir un bac +3 ou équivalent. Il existe aussi la possibilité de faire valoir certaines équivalences, puisqu’en tant qu’école publique, nous voulons rendre accessibles nos formations au plus grand nombre et à la plus grande diversité de profils. Nos élèves viennent de tous les types de filières. Après une sélection sur dossier, les candidats passent un concours d’entrée, puis des épreuves écrites et enfin des oraux.

Nous devons désormais nous adresser à cette génération pour qui le média culturel de référence est le jeu vidéo.

Quels sont les débouchés pour les élèves ?

Le marché du jeu vidéo est en plein essor depuis de nombreuses années. Cela fait cinquante ans que l’industrie existe. Les tendances et les acteurs évoluent. Les « GAAS », [Game As A Service, ndlr] ces jeux gratuits où le joueur paye pour avoir du contenu additionnel, sont en pleine explosion. Le secteur grandit et mute, et demande des profils différents au sein de la production. Nous parlons aujourd’hui de médias interactifs au sens général. Cette interactivité intègre de nouveaux secteurs au-delà des seuls jeux, comme les musées, l’événementiel, ou bien la simple formation ou communication professionnelle. Nous devons désormais nous adresser à cette génération pour qui le média culturel de référence est le jeu vidéo.

Quelle relation entretient le Cnam-Enjmin avec les professionnels du secteur ?

Nous sommes en contact permanent avec les studios de jeux vidéo. Nous avons d’ailleurs une équipe pédagogique où se mêlent enseignants-chercheurs spécialisés et professionnels du secteur. 60 % des cours sont donnés par des professionnels qui travaillent dans des studios, ou chez des éditeurs. Ils sont aussi invités à participer aux jurys qui notent les divers projets des élèves, menés au cours des deux années que dure le master.

Le jeu vidéo est un média qui permet de porter des valeurs d’inclusion, de démocratie, de protection de la nature…

De quels projets s’agit-il ?

Notre leitmotiv est d’encourager nos élèves à être créatifs, innovants et le plus ouverts possible. Nous travaillons en partenariat avec d’autres écoles pour les faire réfléchir sur leur savoir-faire et celui des autres. Ils peuvent arriver avec le projet de développer le prochain Assassin’s Creed, mais nous sommes là pour élargir leur horizon. Leur offrir une connaissance et une expérience nourries d’autres références que celles issues du monde vidéoludique. Dans cette optique, les élèves de première année doivent mettre en scène une expérience interactive de dix minutes. En deuxième année, nous les faisons travailler sur un projet de jeu complet. Pendant quatre mois, ils planchent sur la préproduction d’un jeu, une phase clé. Au passage, nous tentons de leur inculquer des valeurs avant qu’ils n’entrent dans le milieu professionnel.

De quelles valeurs s’agit-il ?

L’accessibilité, par exemple. Cela peut les amener à développer des expériences pour les personnes en situation de handicap. Ensuite, la responsabilité. Nous les sensibilisons sur leur responsabilité, lorsqu’ils développent une expérience, sur l’effet qu’elle provoquera chez le joueur. Ils doivent comprendre qu’ils ont la possibilité d’intégrer des mécaniques vertueuses à leurs projets. Ils peuvent ainsi avoir un impact positif sur le joueur. Le jeu vidéo est un média qui permet de porter des valeurs d’inclusion, de démocratie, de protection de la nature…

La parité est un enjeu important dans le jeu vidéo. Qu’en est-il au Cnam-Enjmin ?

L’industrie du jeu vidéo, c’est 24 % de femmes. Bien évidemment, il y a aussi d’importantes disparités suivant les métiers et les niveaux hiérarchiques. Nous ne faisons pas de discrimination positive à l’entrée, mais nous sommes fiers d’avoir entre 30 et 35 % de femmes dans les promotions, avec un pic à 40 % sur la promotion actuelle. Dans l’équipe pédagogique, nous essayons d’être le plus possible dans la parité. De même avec les intervenants ou les membres des jurys. Nous menons des actions auprès des jeunes, dans les salons, pour expliquer que ces formations conviennent à tous les genres. Nous allons également dans les écoles pour tenter de briser les murs et montrer aux jeunes femmes qu’elles aussi peuvent coder, en espérant susciter des vocations.

Quel rôle tient le plan France 2030 dans le développement de l’école ?

Nous avons développé ces dernières années d’autres formations à côté du master : une filière ingénieur et une licence en programmation, que les élèves peuvent intégrer après le bac. Le plan France 2030 nous permet de développer également de nouvelles licences, en game design et en game art. Cela nous a permis d’ouvrir le master à l’international, en le proposant à des étudiants étrangers.