Cette édition de Pariscience est évidemment très spéciale puisqu’elle est entièrement dématérialisée. À quel moment avez-vous fait ce choix et qu’est-ce qu’un festival en ligne change en matière d’organisation ?
Dès la fin du mois de mars, nous nous sommes posé la question de la formule du festival : présentiel ou dématérialisé ? Nous avions sept mois devant nous pour espérer que la situation s’améliore mais nous avons immédiatement fixé une date butoir pour prendre notre décision. Nous avons tranché au début du mois de juillet et ce fut un arbitrage difficile, un vrai pari à prendre en fonction d’une situation qui nous échappe tous complètement. Organiser un festival en ligne demande des compétences différentes d’une organisation en présentiel. Tout un pan du festival passe à la trappe : l’aménagement des lieux d’accueil, la logistique, la communication, le plaisir de retrouver une équipe d’intermittents et de bénévoles avec qui nous vivons depuis plusieurs années une belle aventure humaine. L’équipe a dû sortir de sa zone de confort et a travaillé d’arrache-pied pour adapter le festival à une formule en ligne, identifier les outils adéquats et se poser les bonnes questions pour anticiper les écueils.
Quels outils ont été déployés pour répondre à ce changement ?
Nous voulions rester au plus proche de la philosophie du festival qui est de faire suivre chaque projection par un échange entre le public, les scientifiques et les équipes des films. Pour rendre les films accessibles gratuitement, nous avons opté pour une plateforme de visionnage à la demande. Nous avons monté un web studio dans nos locaux et mis en place un système de visio-conférence pour permettre aux scientifiques et aux équipes des films d’apporter leur éclairage tout au long de la programmation.
Voyez-vous tout de même un bénéfice à rendre Pariscience accessible à toute la France, quitte à perdre le lien physique avec le public ?
Oui, bien entendu ! Nous avons cette année la chance unique de porter la culture scientifique bien au-delà du périmètre géographique habituel du festival, de développer notre public et la notoriété de Pariscience. Cette expérience nourrit déjà de nouvelles idées, de nouvelles envies qui feront certainement évoluer le festival dès l’an prochain.
La thématique cette année est « Femmes & Sciences ». Comment s’articule-t-elle dans le festival ?
La thématique est choisie en fonction d’une tendance qui se dégage de l’ensemble de la sélection. Les films éligibles ayant été produits dans les mois qui précèdent le festival, on constate que les mentalités évoluent. Les films qui illustrent cette thématique Femmes & Sciences sont disséminés dans toute la sélection, quelle que soit la catégorie. Si certains documentaires sont clairement engagés, la plupart n’essentialisent pas le genre. Ils font intervenir des femmes inspirées ou inspirantes, qui en faisant entendre leur voix, apportent de nouveaux éclairages et remettent en question l’ordre établi.
Le rôle de la science est prépondérant en cette période de crise sanitaire. Décriée, encensée, porteuse d’espoir, elle est au cœur des débats. Qu’est-ce que cela a changé pour le festival ?
Cela nous conforte dans la nécessité de transmettre la culture scientifique et d’encourager le dialogue afin que chacun ait les clés pour se faire sa propre opinion. Au début de la crise sanitaire, la parole scientifique a soudainement envahi le débat public. Mais l’histoire démontre au fil des siècles que la parole scientifique n’est pas forcément parole d’évangile.
Comment se déroule la sélection des films ? Y a-t-il eu un processus spécifique cette année et pourriez-vous évoquer les thématiques qui s’en dégagent ?
Nous lançons chaque année au mois de février, un appel à inscription. Le processus n’a pas changé d’autant que nous n’avons ressenti aucun frein particulier cette année lors des inscriptions. Les sociétés de production françaises et internationales ont répondu présent et nous offrent une fois encore, un panaché de différentes thématiques scientifiques comme l’archéologie, la physique, la médecine, la géologie, les mathématiques, les nouvelles technologies, l’espace, l’éthologie ou encore la biodiversité…
Le documentaire reste-t-il encore le meilleur moyen de vulgariser la science et d’intéresser le grand public ?
Le documentaire est un très bon moyen mais il en existe d’autres. Sa grande force est de pouvoir émerveiller par l’esthétisme des images tout en instruisant. C’est un format qui prend son temps et qui demande à ses auteurs du recul… Les documentaires sont des points de vue, d’auteurs et d’actrices, de réalisateurs et de réalisatrices. Ils offrent un regard singulier que nous sommes libres de partager ou pas. Mais quoi qu’il en soit, ils ouvrent le débat.
Pariscience est organisé par l'Association Science & Télévision (AST qui regroupe 100 producteurs indépendants actifs au sein de 52 sociétés de production) et est soutenu par le CNC.