Premiers pas devant la caméra avec Henri Verneuil
Ma mère, directrice de castings, a fait de sacrés films avec Roman Polanski, Bertrand Blier, Henri Verneuil, des gens que j’étais amenée à croiser. C’est parce qu’ils m’ont donné à voir ce métier-là que j’ai eu envie de reprendre le flambeau. J’ai passé beaucoup de temps au studio de Billancourt où tout le cinéma se faisait. Ma mère ne voulait pas que je tourne dans des films, que ce soit une facilité. Un jour, elle a eu un problème avec un enfant qui s’est désisté d’un tournage. Je me suis retrouvée à jouer Marie-France Pisier enfant, dans une seule scène du Corps de mon ennemi d’Henri Verneuil. C’était un flashback en costume, dans les années 1940.
L’inspiration majeure : Bertrand Blier
Celui qui m’a vraiment inspirée, c’est Bertrand Blier. Quand j’ai voulu faire du cinéma, je me rappelle avoir pris mon courage à deux mains, avoir demandé à ce qu’il me reçoive pour me donner des conseils. Le choc pour moi, ça doit être Beau-père. J’étais préado et je me suis totalement identifiée au personnage qui s’appelle Marion. L’histoire, les dialogues, l’univers : tout coïncidait avec moi. Il fait vraiment partie des réalisateurs qui m’ont donné envie de faire du cinéma. Si je devais avoir un ADN commun avec quelqu’un, ce serait lui pour la transgression. On est aussi obsédés l’un que l’autre par les trios amoureux. J’ai d’ailleurs beaucoup tourné autour de la question avec Dans Les Beaux Jours, Rien à faire, Love etc, Et ta sœur...
Les parapluies de Demy
Comme beaucoup, les premiers films qui m’ont marquée sont ceux qu’on voyait le dimanche soir à la télé, ceux qui racontaient des histoires de grands avec le côté chronique : Claude Lelouch, François Truffaut et Maurice Pialat, que j’ai découvert au cinéma avec A nos amours. Mais on a tous des réalisateurs dont on revoit les films régulièrement et qui aident à vivre. Moi, c’est Jacques Demy avec Les parapluies de Cherbourg. Je fais des séances entières de psychanalyse en parlant des quatre parties du film. Ce long métrage, c’est comme s’il était à moi. Je me souviens également de la découverte des Demoiselles de Rochefort à la télé avec ma mère, de chanter ses chansons à la maison… Mon amour pour ses films est très profond, ça touche des endroits extrêmement mélancoliques, liés aux émotions.
S’il ne devait en rester qu’un : Claude Sautet
Quand j’étais enfant, ado, j’avais un côté « petite vieille ». Je n’aimais pas la musique de jeunes, les films de jeunes… J’aimais Claude Sautet quand ce n’était pas à la mode. C’était l’idée que je me faisais de ce que je serais plus grande : des hommes qui jouent au poker et la femme qui passe par là, avec une chemise masculine car elle s’est levée la nuit et elle sert un whisky aux hommes enfumés. Ces hommes et femmes étaient incroyablement beaux… Si je devais partir avec un film qui m’aide à vivre, qui me rassure, qui ne me laisse pas toute seule, je partirais avec un film de Claude Sautet. Il évoque vraiment la vie avec générosité.
Julia Ducournau et les films « pas sages »
J’ai été extrêmement frappée par le talent de Julia Ducournau dans Grave. Pour moi, qui n’aime pas les films trop sages, c’est un geste artistique incroyable. J’ai été également très impressionnée par Pauline s’arrache (d’Emilie Brisavoine ndlr) et Party Girl (de Marie Amachoukeli et Claire Burger ndlr). C’est le côté « pas sage » qui m’a plu. Je suis très sensible à la prise de risques. La manière dont Mathieu Amalric a relevé le défi du biopic avec Barbara, c’est ce qui m’a le plus inspiré cette année.