« La photographie, c'est la vérité et le cinéma, c'est vingt-quatre fois la vérité par seconde. » Malgré sa disparition lundi 17 janvier, les mots de Michel Subor dans Le Petit soldat (1963) sont éternels. C’est dans le deuxième film de Godard que l’acteur se révèle véritablement, et irradie de sa présence un film éminemment poétique et politique. Sa voix, déjà familière, avait servi un an plus tôt à la narration du Jules et Jim de François Truffaut. Un début de carrière sur les chapeaux de roues qui va lui permettre de décrocher plusieurs seconds rôles au cours des années 60, chez Léonard Keigel (La Dame de pique), comme André Cayatte (dans le diptyque de 1964, La Vie conjugale). Cette notoriété lui ouvre également les portes du cinéma international, tout d'abord dans Quoi de neuf, Pussycat ? (1965) du Britannique Clive Donner, puis chez le maître du suspense dans L'Etau (1969). Sous la direction d'Alfred Hitchcock, ce maverick du cinéma français joue le rôle de François Picard, gendre d'un agent de renseignements propulsé dans un monde d'espions et de secrets d'État.
Malgré ces collaborations prestigieuses, Michel Subor peine à s'imposer en tête d'affiche, certainement à cause de sa franchise légendaire et de son inaltérable liberté. Après 30 ans de disette, durant lesquels il enchaîne les petits rôles - chez Jean-Louis Bertuccelli, notamment - l'acteur d'origine russe et azerbaïdjanaise renaît devant la caméra de Claire Denis. Avec Beau Travail (1999) - film dans lequel il reprend son rôle de Bruno Forestier, 36 ans après Le Petit soldat -, il entame une collaboration fructueuse avec la cinéaste, pour qui il tournera à trois autres reprises : L'Intrus (2004), White Material (2009) et enfin Les Salauds (2013), son dernier film. Ses autres apparitions en fin de carrière n'en sont pas moins marquantes, à l'image de son rôle du magnat de la presse à scandale Mac Roi dans La Fidélité d'Andrzej Zulawski (2000) et ou en trafiquant d'héroïne - et producteur de films - dans Sauvage Innocence (2001) de Philippe Garrel.