Comment inte?grez-vous les effets spe?ciaux dans le de?veloppement de vos projets ?
Nicolas Bary : Je considère les effets spéciaux comme un poste artistique à part entière, au même titre que la photo ou la décoration. Ils doivent être une plus-value visuelle au service du scénario, sans être cantonnés aux trucages de rattrapage. Je les intègre très tôt dans le processus de préparation. Il s’agit d’un savant dosage entre l’exigence artistique et les contraintes économiques, avec une culture de l’image qui est aujourd’hui très forte. Le choix du superviseur des effets spéciaux est primordial. Il doit, à mon sens, intervenir le plus tôt possible dans le projet. Par exemple, mon premier long métrage, Les Enfants de Timpelbach, s’ouvre sur une scène dans laquelle la caméra suit un chat qui court dans tout un village : à l’origine, cette introduction avait été envisagée en prise de vue réelle. Au moment de la réalisation, nous nous sommes rendus compte que cela ne serait pas accessible pour nous en termes de moyens humains et financiers. Nous avons repensé la scène en animation : une solution beaucoup mieux adaptée à l’effet voulu, plongeant le spectateur dans un univers visuel fort dès les premières images, tout en réduisant considérablement le budget.
Le CNC a lance? son plan en faveur des effets spe?ciaux il y a un an, quels en ont e?te? les premiers effets selon vous ?
NB: Dès mes débuts, mes projets ont régulièrement été soutenus par le CNC : après avoir reçu l’aide aux nouvelles technologies sur mon dernier court métrage Judas, j’ai aussi produit un court métrage, Eve d’Éric Gandois, réalisé en 3D stéréoscopique, pour lequel nous avons aussi été accompagnés. Je développe actuellement un projet de réalité virtuelle intitulé Polaris, en discussion avec le CNC. En France, le cinéma du réel est culturellement et historiquement très ancré par rapport à celui du divertissement. Souvent, les effets spéciaux peuvent être intégrés tard dans la réflexion de la chaîne de production. Que le CNC soit à l’initiative d’un plan en faveur des effets spéciaux me semble extrêmement positif. Qu’ils soient placés, de surcroît, au cœur de la création artistique, est pour moi primordial.
Filmographie de Nicolas bary
- 2016 : Le Petit Spirou
- 2014 : Un mari pour l'hiver
- 2012 : Au bonheur des ogres
- 2011 : Clinic
- 2007 : Les Enfants de Timpelbach
- 2006 : Judas (court me?trage)
- 2004 : Before (court me?trage)
Quels sont pour vous des effets spéciaux réussis ?
NB: Un film est réussi lorsque les effets spéciaux ne se voient pas. Ils doivent être au service de l’histoire et non l’inverse. Inutile de faire étalage de prouesses technologiques, si derrière, l’histoire n’est pas bonne. Il est, à mon sens, préférable de les mélanger au maximum avec des choses réelles pour que les trucages ne se voient pas. Utiliser des effets spéciaux dans un film impose une réflexion sur la manière de les amener dans un budget nécessairement limité. Et cette contrainte produit elle-même de la créativité. Il faut savoir choisir les effets les plus pertinents pour rendre compte au mieux de ce qu’on souhaite transmettre. Sur Le Petit Spirou, j’avais envie d’aller vers un film familial, poétique et sensible, qui parle aux enfants. Les effets spéciaux ont été pensés pour répondre à cette atmosphère.
Votre film Le Petit Spirou a be?ne?ficie? du cre?dit d’impo?t. Cela e?tait important pour vous de tourner en France ?
NB: Oui, sans le crédit d’impôt, Le Petit Spirou aurait probablement été tourné en partie hors de France. Au-delà de l’impact économique, il me semble qu’un projet est plus cohérent à faire aboutir lorsque les membres de l’équipe, surtout lorsqu’ils se connaissent bien, peuvent travailler ensemble et au plus tôt dans le processus de production. C’est ce que nous avons réussi à faire avec Le Petit Spirou grâce à ce dispositif.