Marcel Jean, comment définiriez-vous le rôle du délégué artistique du festival d’Annecy ?
Très concrètement il s’agit de planifier les grandes lignes du festival à l’avance. Je travaille sur un plan triennal. Je sais déjà quelles seront les grandes lignes du festival de 2020, 2021 et 2022. C’est la première partie de mon travail : présenter une vision artistique à moyen terme. Et prévoir à l’avance les changements. Cette année par exemple, on lance une compétition VR et il y a également une nouvelle section – contrechamps. Ce sont des changements dont nous avons discuté avec l’équipe, il y a deux ans, et annoncé l’an dernier pendant le précédent festival. C’est ça la base de mon travail : proposer cette vision et en élaborer les grandes lignes.
Mais cette vision, vous la mettez également en œuvre.
Evidemment : une fois posée, je propose un plan d’action pour que les choses se fassent.
Concrètement, de quoi s’agit-il ?
C’est très différent, très variable. Je dois par exemple trouver les collaborateurs qui dans différents pays vont nous aider à réaliser les grands hommages du festival. L’année dernière nous avions mis à l’honneur le Brésil. Nous avions identifié pour l’occasion les agences économiques qui pouvaient nous aider à monter les séances spéciales, mais aussi les programmateurs qui allaient nous donner un coup de main pour trouver le contenu. Je dois identifier ces partenaires, négocier avec eux, et imaginer l’événement dans sa globalité… C’est un travail de longue haleine.
Sans parler de celui de la sélection…
Je dirais même plus : DES sélections. La sélection officielle et toutes les sections compétitives représentent un énorme travail. On lance chaque édition en réajustant les règlements, puis on reçoit les inscriptions et dès novembre, on forme des équipes de pré-sélectionneurs qui commencent à faire du visionnage et vont me remonter les films les plus notables. Pour arriver à la sélection finale. Je me consacre essentiellement à la sélection des longs métrages, à celle des courts métrages professionnels et à la télévision. Pour la VR (qui a le droit cette année à sa propre compétition), il y a un comité qui se charge entièrement de la sélection et me présente le résultat à la fin. Mais, oui, c’est effectivement un énorme travail. Cette année, on était huit à travailler sur l’ensemble des sélections.
Combien de films avez-vous vus pour cette édition 2019 ?
Juste pour la sélection longs métrages… un peu moins de 100. Mais toutes sections confondues, on nous a présenté près de 3200 œuvres. Ça en fait pas mal à voir, mais étalé sur six mois ça devient un peu plus raisonnable (rires).
Vos fonctions doivent aussi comprendre un travail de représentation du festival…
Oui, je me déplace beaucoup auprès des studios, à Paris, Los Angeles ou New-York. Je fais des tournées, je rencontre des gens, je vais voir les films en production aussi. C’est un job essentiel parce que, à ce moment-là, je m’assure que je suis dans la mire de tous les gens qui font des films. C’est une manière d’asseoir la reconnaissance de l’événement.
C’est votre septième édition, comment avez-vous vu évoluer le festival ?
C’est un secteur en perpétuel mouvement, et la manifestation doit évoluer, s’adapter aux nouveaux paysages et aux changements d’environnement. Il faut chaque année nous positionner face à de nouvelles réalités. Il y a sept ans, la VR n’était pas encore dans nos viseurs et cette année, ce sera l’un des points forts du festival. Nous avons aussi mis l’accent sur les rencontres car je crois vraiment qu’il faut amener une plus-value au simple fait de montrer les films. C’est la beauté de cette fonction de directeur de festival : nous sommes condamnés à nous renouveler chaque année. On doit être à l’écoute et sentir comment vibre le secteur.
Le Festival international du film d’animation d’Annecy se déroule du 10 au 15 juin 2019.