« Mon chien Stupide » : comment Yvan Attal a adapté John Fante

« Mon chien Stupide » : comment Yvan Attal a adapté John Fante

29 octobre 2019
Cinéma
Mon chien Stupide
Mon chien Stupide StudioCanal - Same Player - Good Times Production - Montauk Films - France 2 Cinéma
Après le succès du Brio, Yvan Attal s’attaque au roman de John Fante. Il y interprète un écrivain coincé entre des enfants insupportables et une crise d’inspiration. Le réalisateur analyse pour le CNC son travail d’adaptation.

Comment avez-vous envisagé de porter à l’écran Mon chien Stupide, roman de l’écrivain américain John Fante ?

Claude Berri, producteur de mes deux premiers films - Ma femme est une actrice et Ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants-, m’avait proposé d’adapter Mon chien Stupide il y a 20 ans. A l’époque, j’étais passé totalement à côté du roman… Je pense qu’il fallait être plus vieux pour s’identifier au père de famille. Et puis, on me l’a reproposé récemment, et entre temps, c’était devenu le livre préféré de mon fils, Ben. Si j’avais eu la sensation que c’était un monument, je ne m’y serais pas collé.

Qu’avez-vous pensé en le relisant ?

J’ai été frappé par les similitudes que je pouvais faire entre ma vie et celle de ce romancier qui voyait partir ses quatre enfants du foyer. Avoir passé 20 ans avec la même femme et être père de trois enfants avait totalement changé la donne. Ça m’amusait de reprendre la boucle de Ma femme est une actrice et Ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants et de revenir à ces histoires de couple que j’avais déjà traitées il y a 20 ans. Avec cet élément capital en plus : la paternité. Tous les gens qui ont des enfants savent que c’est compliqué… Du coup, ces trois films forment comme une trilogie sur le couple, même si à la base cela n’a pas été conçu comme tel. Il y avait de la comédie mais aussi de la mélancolie.

Comment avez-vous procédé pour l’adaptation ?

On m’a dit que c’était inadaptable, et honnêtement je ne comprenais pas ce qu’on me disait. Je me suis concentré sur ce qui m’a plu dans ce livre : ce type qui n’en peut plus de sa femme et de ses enfants. Avec ma coscénariste, Yaël Langmann, on a d’abord transposé l’action de l’Amérique des années 60 à la France contemporaine. Je voulais garder l’idée des longs trajets en voiture et des grands espaces. J’en avais un peu marre de filmer les rues parisiennes, alors nous avons situé l’action sur la côte basque.

Y a-t-il eu des changements au niveau des personnages ?

Dans le livre, le personnage de l’épouse, Harriet, est réduit à quelques clichés : elle est raciste, elle reste à la maison et ne fait pas grand-chose. Ce n’était pas un personnage contemporain.

 Le gros du travail d’adaptation de Mon chien stupide était d’écrire un vrai rôle de femme

Je savais que Charlotte Gainsbourg l’interprèterait, mais ce n’est pas pour ça que j’ai étoffé le rôle. Jouer au couple avec Charlotte, ça fait gagner du temps. Comme c’est établi qu’on est couple, la crédibilité est établie. Les spectateurs ne se posent pas la question.

De quoi êtes-vous le plus le fier dans votre travail d’adaptation ?

Je crois que je suis assez fidèle à l’esprit de John Fante. On a présenté le film au Festival John Fante, dans les Abruzzes d’où il est originaire en Italie, et ma plus belle récompense a été de voir les enfants de John Fante en larmes à la fin. Ça les remuait parce que c’est un peu leur histoire : même si leur père a beaucoup romancé, ça les ramenait à une partie de leur vie.

Quelles sont vos références, en terme d’écriture sur le couple ?

Toujours les mêmes. Woody Allen, Francis Ford Coppola, Sidney Lumet. Ça n’a jamais changé. Rien n’est aussi bien que leurs films qui m’ont donné envie de faire du cinéma.

Ils ont peu traité le couple…

Ce n’est pas la question. Le sujet vient de vous. Mais la façon de faire vient des autres. Ils m’ont façonné. Je regarde comment ils font avec une grande scène, comment ils avancent dans l’histoire, comment ils utilisent la musique. Comment la caméra bouge et comment elle ne bouge pas.

Mon chien Stupide d’Yvan Attal, qui sort le 30 octobre, a bénéficié de l’aide à la création visuelle ou sonore.