Le Mariage forcé de Molière est la reconstitution d’un spectacle de marionnettes, adaptant la pièce de Jean-Baptiste Poquelin, montée par les prisonniers d’un stalag en Allemagne pendant la Seconde Guerre mondiale. Témoignage émouvant sur l’activité de ceux qui résistent encore grâce à une pratique culturelle et ludique et vibrant hommage à la liberté du théâtre de Molière, ce film réalisé par Pierre Neurisse en 1946, participe avec Retour en France (1945) de son travail de mémoire cinématographique autour de son expérience de la déportation.
La première partie de son Mariage forcé de Molière met d’ailleurs en scène, sous forme de mise en abyme, les conditions de vie des prisonniers de guerre, interdits de toute distraction par une marionnette de soldat allemand, avant de laisser place à la représentation de la pièce.
Pierre Neurisse (1914-1995) fut un homme d’engagements. Résistant, il est arrêté et subit l’épreuve du stalag. Dans l’après-guerre, il se met pleinement au service de l’image animée, cinématographique et télévisuelle. Producteur attentif soutenant la jeune création, il permet à Jacques Rozier (Rentrée des classes, 1956) ou Pierre Beuchot (Requiem, 1972) de réaliser grâce à sa société Dovidis, fondée en 1950, leur premier court-métrage. Il en va de même pour Paulina s’en va (1969), premier long métrage d’André Téchiné. Cet engagement se fait militant en 1968 lorsqu’il ouvre ses studios aux réalisateurs, monteurs et techniciens qui souhaitent poursuivre en toute liberté leur pratique de l’image animée. Un militantisme qui se lit aussi dans la production de films sans concessions comme Derrière le mur, vingt ans après (1966) de Jacqueline Meppiel et Mario Maret, Rio Chiquito (1970) de Jean-Pierre Sergent ou Le Fond de l’air est rouge (1977) de Chris Marker.
Le Mariage forcé de Molière a été restauré par la Direction du patrimoine du CNC.
