Le cinéma, une vocation
Né en 1943, Pierre-William Glenn découvre le cinéma à six ans, au Gaumont Palace – la plus grande salle de cinéma d’Europe à l’époque – avec sa mère. C’est le début d'un amour invétéré pour la salle obscure. La même année, il déménage à Montreuil et se découvre pour voisin Claude Miller, d'un an son aîné. Tous deux fréquentent la même école. Inséparables, ils partagent dès qu'ils le peuvent des séances de cinéma. Pierre-William Glenn devient un habitué des salles, à tel point qu’il tient des carnets de bord dans lesquels il note ses impressions de jeune cinéphile. C'est ainsi qu'il développe progressivement son œil et son goût pour l’image.
Quelques années plus tard, alors que Claude Miller se lance directement dans le cinéma et intègre l’IDHEC (Institut des Hautes Études Cinématographiques, ancien nom de La Fémis), Pierre-William Glenn se dirige vers des études scientifiques. C'était sans compter le jour où son camarade lui propose de faire l’acteur le temps d’un tournage amateur. Pierre-William Glenn découvre alors la lumière, le studio et le matériel technique nécessaire à la réalisation d’un film, dont les caméras. Et à son tour, il intègre l'IDHEC en 1964.
Formé par le chef opérateur Alain Derobe, il débute comme assistant des directeurs de la photographie William Lubtchansky et Jean Gonnet. À cette époque, la profession de chef opérateur est très encadrée puisqu'une carte professionnelle est nécessaire pour exercer. Pour obtenir ce précieux sésame, il faut notamment avoir travaillé sur trois longs métrages comme premier assistant et comme cadreur.
Une carrière prolifique
Pierre-William Glenn fait ses armes sur les courts métrages de son ami Claude Miller mais également de Jacques Doillon et de Jean-Louis Comolli. Il faut attendre la fin des années 1960 et le film Le Cousin Jules (1968) de Dominique Benicheti pour le voir travailler sur du long. Il collabore ensuite avec André Téchiné (Paulina s’en va, 1969), Marin Karmitz (Camarades, 1969), Jacques Rivette (Out one, 1970) ou encore Peter Goldman sur Wheels of ashes, film grâce auquel il se fait remarquer dans le milieu.
Les années 1970 lui sont particulièrement prolifiques. Pierre-William Glenn enchaîne les tournages et œuvre auprès de grands réalisateurs. Il tourne notamment avec José Giovanni (Comme un boomerang, 1976), Costa-Gavras (État de Siège, 1972), Yannick Bellon (La Femme de Jean, 1973) et François Truffaut (La Nuit américaine, 1973 ; L’Argent de poche, 1975).
À partir de 1973, il s’engage dans une collaboration régulière avec Bertrand Tavernier. Il dirige la photographie de sept de ses films, dont L’Horloger de Saint-Paul (1973), Le Juge et l’Assassin (1975), La Mort en direct (1979) et Coup de torchon (1981). On le retrouve aussi régulièrement aux côtés d’Alain Corneau. Il travaille d’abord sur la photographie de France société anonyme (1973), puis sur celles de Série Noire (1978) et du Choix des armes (1981). Il tourne également avec Maurice Pialat (Passe ton bac d’abord, 1978 ; Loulou, 1979) et Claude Lelouch (Hasards ou coïncidences, 1997 ; And now… Ladies and Gentlemen, 2001). En parallèle, il mène une carrière aux États-Unis où il filme en 1998 Marlon Brando et Susan Sarandon dans Une Saison blanche et sèche d’Euzhan Palcy.
La liste de ses collaborations est longue puisque Pierre-William Glenn compte plus de 75 longs métrages à son actif comme chef opérateur et directeur de la photographie.
Avant-gardiste
La Nouvelle Vague constitue une rupture esthétique et technique avec la tradition cinématographique française. Le matériel est allégé, les caméras peuvent désormais être portées à la main ou à l’épaule. C’est d’ailleurs Pierre-William Glenn qui importe en France la technique du « steadicam », un système portatif de stabilisation de prise de vues inventé par l'Américain Garrett Brown. Il permet au cadreur de filmer en marchant sans que la caméra ne tremble, et ainsi s’émanciper d’installations plus complexes comme les grues ou les travellings sur rail. Ce procédé offre une plus grande liberté de mouvement et une mise en place plus rapide. Pierre William-Glenn le propose aux réalisateurs avec qui il travaille. Une technique vite adoptée par des cinéastes tels que Bertrand Tavernier, Alain Corneau (notamment dans Série Noire) et Jacques Rivette. Toujours prêt à tourner, habile et inventif, il est considéré comme un « opérateur Nouvelle Vague ».
De l’image à la réalisation
Pierre-William Glenn enchaîne les tournages, mais trouve le temps de réaliser ses propres films. Il débute en 1974 avec le documentaire Le Cheval de fer, un premier long métrage sur les meilleurs pilotes de moto d'Europe. Il tourne également des fictions : Les Enragés (1985) avec Fanny Ardant et François Cluzet, Terminus (1986), et 23 heures 58 (1993). Plus récemment, il réalise Les Silences de Johnny, un documentaire consacré à la carrière d’acteur de Johnny Hallyday, présenté à Cannes en 2019.
Une expertise au service de Cannes
En 2002, Pierre-William Glenn devient président de la CST (Commission Supérieure Technique de l’image et du son), l'association des techniciens du cinéma et de l'audiovisuel. Dans le cadre de ses fonctions, il se charge, à partir de 2003, de la gestion technique de la salle de projections du Grand Auditorium du Festival de Cannes. Il s’occupe, avec ses équipes, de l’installation complète des équipements ainsi que des répétitions en amont des projections.
De 2005 à 2019, Pierre-William Glenn codirige le département Image de La Fémis, l'école qui l'a formé (à l'époque sous le nom de l'IDHEC). Un retour aux sources pour cet inlassable passeur d'images, figure centrale du cinéma français et de la Nouvelle Vague.